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Implantologie et lasers

Récupération d’une péri implantite par ROG. En haut à gauche : mise en évidence par sondage de la profondeur de la destruction osseuse peri-implantaire. En haut à droite : mise en évidence de la collerette de tissus granulomateux périphériques de l’implant. En bas à droite : visualisation de la destruction osseuse et de spires exposées après assainissement au laser Er:YAG. En bas à gauche : récupérations tissulaires à 3 mois postopératoires. Assainissement de l’environnement implantaire.
Dr Gérard Navarro

Dr Gérard Navarro

ven. 13 juin 2014

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Le problème de la préparation des sites implantaires fait partie de la recherche fondamentale et clinique. Il n’est pas à ce jour résolu. Nous savons que l’association laser Er:YAG et CFAO permettra probablement de scanner le site à implanter, puis de définir les paramètres laser de préparation du site, et enfin de réaliser la prothèse supra-implantaire. Mais à ce jour, l’assistance clinique laser n’est utilisée que dans deux directions principales en implantologie : l’operculisation lors de la 2de phase implantaire, et la décontamination des surfaces implantaires, en présence de péri-implantites.

Le rapport de consensus du 6e EWOP (2010) donne statistiquement pour les implants posés, des valeurs moyennes de perturbations cliniques représentant des :

_Péri-implantites : chez 28 à 56 % des patients (12 à 40 % des sites).

_Mucosites : chez 80 % des patients (soit 50 % des sites).

De ce fait, la gestion de cette nouvelle pathologie devient un problème crucial pour le chirurgien-dentiste implantologue et/ou prothèsiste, surtout quand ces maux affectent des piliers implantaires dans de grandes reconstitutions prothétiques récentes. Le phénomène est de nos jours de plus en plus prévalent et notre propos sera de voir en quoi les lasers sont une innovation utilisable efficacement dans le traitement de ces pathologies.

Le traitement de la périmucosite et de la péri-implantite est superposable à celui de la gingivite et de la parodontite.

_Pour la gestion des périmucosites. La périmucosite n’entraine pas de perte osseuse. L’essentiel du traitement consiste à éliminer et contrôler le biofilm au niveau du col implantaire et de la couronne. Les atteintes inflammatoires sont réversibles. L’utilisation de la Photo Dynamic Therapy avec un laser diode de 635 nm peut être un traitement associé efficace, comme démontré en parodontologie.

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_Pour la gestion des péri-implantites. La prise en charge non-chirurgicale dite à l’aveugle, ne permet pas un accès direct à la surface implantaire. Seuls les tissus mous peuvent être totalement irradiés. On ne peut pas être sûr d’irradier, de cette façon, la totalité de la surface de l’implant contaminé en particulier les aces inférieures des spires de l’implant. La prise en charge d’une péri-implantite nécessite une technique à ciel ouvert afin de décontaminer et de restaurer une couche d’oxyde de titane (TiO2) nécessaire à la recolonisation par les cellules osseuses (Mouhy J. et al., 2012). Cette couche d’oxyde obtenue, une technique associant une régénération osseuse guidée, combinant une membrane à une greffe osseuse est nécessaire (Jung, R.E. et al., 2003).

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Les maladies péri-implantaires atteignent 45 à 55 % des patients implantés (Berglundh et al., 2004), dont 7 à 14 % présentent des pertes sévères avec saignements et pus (Roos-Jansåker A.M. et al., 2006). L’étiologie de ces maladies et leur pathogénie sont complexes à cerner et leurs traitements restent difficiles, surtout si on est en présence de tabagisme, gros facteur de risque. Il n’existe pas de méthode capable, de prédire, de résoudre et de résorber les pertes dues aux péri-implantites,

Les infections peri-implantaires sont dues à une réaction inflammatoire avec perte concomitante d’os support dans la zone marginale de l’implant après sa mise en fonction (Kao et al., 1997). On rappelle que les critères de succès de la bonne ostéo-intégration d’un implant sont :

_l’établissement d’un contact direct : implant/os ;

_la présence de tissus péri-implantaires (durs et mous) sains (Cochran et al., 1997 ; Schroeder et al., 1981).

En première remarque, on doit différencier que les atteintes inflammatoires implantaires sont dans ce cas irréversibles avec des pertes osseuses. En seconde remarque, il faut déterminer de manière exhaustive, les étiologies possibles, liées aux échecs implantaires, de manière à établir avec efficacité la stratégie thérapeutique à sélectionner, pour espérer réobtenir une réostéo-intégration des implants atteints.

Sur le plan clinique, la péri-implantite est l’échec de l’ostéo-intégration, caractérisé en dernier stade par une mobilité de l’implant (Esposito et al., 1998). Un implant présentant une péri-implantite, peut être stable cliniquement, mais est caractérisé par une perte osseuse périphérique de classe (I ou II), et par la formation d’une poche (Zablotsky et Kwan, 1994).

On se doit de rappeler que la rugosité de surface de l’implant joue un rôle majeur dans le processus de colonisation bactérienne : les implants à surface rugueuse ont une plus grande prévalence de péri-implantites (J. Clin. Periodontol., 2008). De même que les antécédents de parodontite chez les patients sont des prédispositions à des péri-implantites (I.K. Karoussis et al., 2003) :

_Patients à antécédents de parodontite chronique (incidence 28,6 %).

_Patients indemnes de parodontite (incidence 5,8 %).

Les résorptions osseuses peuvent être sévères et différentes propositions thérapeutiques de ces péri-implantites ont été présentées, du traitement a minima par simple décontamination et désinfection, aux traitements complexes avec curetage et antibiothérapie associée.

Toutes ces méthodes copiées sur celles utilisées dans le traitement des parodontites, n’ont pas permis de réostéointégration complète. Les résultats sont souvent aléatoires. La régénération osseuse guidée a été utilisée. Mais les preuves d’une réostéointégration n’ont pas été établies.

Le cahier des charges du traitement des péri-implantites doit satisfaire à :

_L’élimination complète des contaminants de surface.

_La non-modification de la surface initiale de l’implant.

_Le rétablissement de la composition atomique initiale de TiO2.

En aucun cas le traitement ne doit perturber ou contrarier une possible cicatrisation tissulaire. Une réostéo-intégration est espérée après le traitement. (Renvert S. et al., 2009). Les lasers peuvent ils contribuer à des solutions plus fiables dans ces thérapeutiques ?

Le traitement non chirurgical des péri-implantites

L’élimination de la plaque bactérienne a été recommandée par des thérapies mécaniques et chimiques : débridement non-chirurgical de la lésion ; antiseptiques locaux et/ou systémiques, en suivant les mêmes principes que pour le traitement des parodontites (Mombelli A. et al.,1997, Ericsson I. et al., 1996). Mais le traitement mécanique seul à l’aide de curettes et/ou d’ultra sons, n’a pas été assez efficace (Kotsovilis S. et al., 2008).

Parfois l’adjonction d’un traitement chimique local ou systémique par antiseptique (CHX 0,2 %, Iode, H2O2), antibiotique (ornidazole, amoxicilline + acide clavulanique, tétracycline, doxycycline, minocycline), peut améliorer les résultats (Lindhe J. et al., 2008. Renvert S. et al., 2008), mais le contrôle de plaque demeure permanent, tous les 3 mois, pour les patients avec des antécédents de parodontite.

Le traitement chirurgical des péri-implantites

La chirurgie doit être réalisée, après l’élimination de l’inflammation ; après l’arrêt de la progression de l’infection. Le but est de réaliser une chirurgie d’accès par lambeau d’assainissement, suivie d’une décontamination de surface. Mais cette solution est insuffisante. On peut pratiquer une gingivectomie pour réduire la profondeur de la poche, voire pratiquer un fraisage et un polissage des spires exposées de l’implant (Bercy P., Tenenbaum H., 1996. Romeo E. et al., 2007). On peut tenter une régénération osseuse guidée pour remplir le défaut osseux par Greffe Osseuse de comblement (BG), Régénération Osseuse Guidée (GBR), en sélectionnant différents matériaux de greffe : os autogène, biomatériaux, qui seront mis au contact de la surface de l’implant. Dans la plupart des cas, on obtient une amélioration de la situation clinique (Claffey N. et al., 2008)

L’apport des lasers

En partant du principe que les lasers offrent beaucoup d’avantages :

1. Pas de résistance bactérienne.
2. Pas de réaction allergique possible.
3. Pas d’interaction médicamenteuse.
4. L’irradiation des tissus mous et durs est totale (épithélium de la poche, tissu de granulation, parois osseuses résiduelles).
5. Destruction des bactéries intracellulaires (PG) des tissus mous de recouvrement, non accessibles aux antibiotiques et représentant une source de recontamination.
6. Désinfection des surfaces Ti des implants lisses, TPS, HA ou SLA.
7. Pouvoir bactéricide.
8. Elimination des toxines bactériennes.
9. Elimination des lipo-polysaccharides (LPS).

On peut en plus, s’appuyer sur des études de plus en plus nombreuses sur les effets physiques de l’irradiation des lasers utilisables en dentisterie, sur les surfaces des implants titane et en particulier sur celle de Kreisler M. et al., (2002).

D’autres études, portent sur les effets biologiques, influencés par l’irradiation laser du titane, par exemple celle in vitro, de Lee et al., (2008), qui était d’étudier les réponses de croissance et de prolifération d’ostéoblastes ensemencés sur des disques de titane anodisé, irradiés à l’aide d’un laser CO2 ou d’un laser Er,Cr:YSGG. La prolifération cellulaire est plus active sur les disques traités avec l’Er,Cr:YSGG à 300 J/cm2. Cette étude montre que l’irradiation avec un laser (CO2, ou Er,Cr:YSGG dans cet exemple) peut induire une prolifération et une différentiation cellulaire quantifiable. La méthode a été inspirée par l’étude non quantifiée de Romanos G. et al., en 2006.

Les études les plus édifiantes ont été basées sur l’utilisation de l’erbium, qui paraît devenir la longueur d’onde la plus universellement utilisée en dentisterie. Les japonais Matsuyama T. et al., en 2003 démontrent que le laser Er:YAG à 30 mJ par pulse, 30 Hz avec spray permet de débrider les piliers implantaires sans altérer leurs surfaces, en éliminant efficacement la plaque dentaire et le tartre. Les controverses sont cependant possibles. Ainsi, Schwarz F. et al., (2006), montrent que l’Er,Cr:YSGG, même s’il démontre une grande efficacité dans l’élimination du biofilm de la plaque, ne permet pas de rétablir à coup sur la biocompatibilité du titane, car son influence est très dépendante de la façon de distribuer l’énergie. Pour les Japonais Takasaki A.A. et al., (2007), l’utilisation de Er:YAG à 100 mJ par pulse et spray, dans le traitement des péri-implantites, est plus efficace et plus sûre que l’utilisation de curettes en plastique, pour le débridement de la surface de l’implant et dans le retrait du tissu de granulation environnant, favorisant même, une croissance osseuse plus importante.

Mais d’autres études, utilisant des lasers CO2 sont à prendre en considération pour le traitement des péri-implantites, avec ou sans greffes osseuses de biomatériaux plus membranes. Leurs résultats in vivo sont appréciables. (Romanos G. et al., 2008).

Les lasers diodes, peuvent être utilisés dans ces traitements des péri-implantites, mais les variétés des longueurs d’ondes utilisables, les protocoles et les paramètres nombreux sont difficilement interprétables.

Les lasers néodyme-YAG sont contre-indiqués pour irradier les surfaces des implants, car ils chauffent exagérément le métal et provoquent des altérations physiques du Ti (Kreisler M. et al., 2002).

Les méthodes de traitement des péri-implantites

1. La croissance osseuse avec des méthodes conventionnelles

La croissance osseuse est variable en fonction de la technique utilisée. L’étude de Nociti Júnior FH. et al., (2001), le démontre par ses résultats :
Débridement (DE) présente 14,03 % de croissance osseuse.

DE + GBR = 21,78 % de croissance osseuse.

DE + BG = 21,26 % de croissance osseuse.

DE + GBR + BG = 27.77 % de croissance osseuse.

DE + détoxification de la S2 implantaire + greffe osseuse + membrane donne le meilleur résultat, soit 38,03 % de croissance osseuse.

Donc la détoxification de la surface de l’implant augmente de 10 % les résultats lors d’une greffe osseuse de comblement, au niveau d’un site détruit par la péri-implantites. Ainsi, l’attention sur l’acte chirurgical doit être faite au niveau de cette détoxification, car la surface TiO2 est chimiquement dynamique. Elle provoque une réaction histologique à l’interface Ti/Os (Clark A.E., Hench L.L. et al.,1976). La surface implant TiO2 peut être considérée comme un biomatériaux utilisant des protéines et des cellules du site implantaire, et permettant une réponse tissulaire maximum (Ratner B.D., 1993). Le TiO2 passive les agents destructeurs d’os après la blessure de l’os. En particulier l’H2O2 produit par les PMN (1re réaction de défense contre un agresseur pathogène [Mouhyi J. et al., 2009]).

2. Les méthodes Physico-chimique de décontamination de S2 des implants.

Classiquement on a proposé :

_Les ultrasons + le tri-ethanol : pas utilisable cliniquement (Walrvaara et al., 1992).

_Le phrophy-jet + chloramine T 1 % : mais on obtient des microabrasions et des contaminations de la surface de l’implant par le Na+ (Zablotsky et al., 1992).

_Le prophy-jet + Ac. citrique : on trouve aussi des microabrasions (Jovanovic et al., 1993).

Comme la contamination atomique modifie la biocompatibilité d’un biomatériaux (Bjursten et al., 1985), la méthode laser de décontamination préconisable, est le traitement chirurgical à ciel ouvert avec irradiation à l’aide d’un laser Er ou CO2 , surtout si l'implant atteint est important dans une reconstitution prothétique et ce de la manière suivante :

1. Passage laser pour la carbonisation et la vaporisation des bactéries et des tissus inflammatoires en mode pulsé de la S2 :

_par laser CO2 à 8 W,10 ms,20 Hz ;

_par laser Er:YAG à 250 mJ, maximum, 10 Hz sur la surface SLA, 300 mJ, 10 Hz sur la surface polie (Stubinger S. et al., 2006).

2. Passage d’Ac.citrique 30 s, pour détacher les traces de carbonisations du Ti (si utilisation du C02).

3. Rinçage au serum physiologique pendant 2 minutes.

4. Application d’H2O2 à faible concentration, comme source d’O2.

5. L’H202 est préévaporé par passage laser CO2 pour obtenir la passivation du Ti (2 H2O2→2 H2O + O2).

Mais il ne faut pas imaginer que cette technique permet de rattraper toutes les situations implantaires difficiles. L’implant contaminé doit être retiré si les conditions d’accès sont difficiles, si la perte osseuse équivaut à plus de la moitié de la hauteur de l’implant. Si c’est le cas, on peut prévoir la reconstitution osseuse du site et la réimplantation sera différée.

Conclusions

Les lasers s’inscrivent aujourd’hui naturellement dans l’arsenal thérapeutique en parodontie et en particulier dans le traitement des péri-implantites. De plus, ils apportent un confort de travail associé à de faibles suites opératoires. L’utilisation des lasers dentaires, en complément avec ou en remplacement des méthodes traditionnelles de la parodontologie et de l’implantologie, sera indispensable en chirurgie dentaire contemporaine (Walsh L.J., 2003) dans la mesure où l’irradiation laser qui stimule la production des Heat Shock Proteins (HSP) aussi bien au niveau gingival, qu’au niveau osseux, permet d’optimiser la cicatrisation des tissus (Desmons S., 2008),

Les lasers peuvent être considérés comme des outils prometteurs dont les protocoles opératoires restent à préciser. Ce travail méthodologique fera des lasers, un outil indispensable associé à des traitements fiables et reproductibles. Les controverses sont toutefois encore présentes et en particulier il n’a pas été démontré de façon indiscutable que cette assistance se montrait plus apte que les méthodes traditionnelles, à résoudre tous les problèmes.

Note de la rédaction : une liste des références est disponible auprès de l’éditeur.
Cet article est paru dans le magazine DT Study Club, Vol.2, numéro 2, juin 2014.

Fig. 1_Traitement d’une lésion angulaire classe I de péri-implantite sur un implant HA (recouvert d’hydroxy apatite), par laser Er:YAG.
Fig. 2_Traitement d’une péri-implantite à l’aide d’un laser Er:YAG, par technique à ciel ouvert. Cicatrisation à 20 jours.
Fig. 3_Récupération d’une péri implantite par ROG. En haut à gauche : mise en évidence par sondage de la profondeur de la destruction osseuse peri-implantaire. En haut à droite : mise en évidence de la collerette de tissus granulomateux périphériques de l’implant. En bas à droite : visualisation de la destruction osseuse et de spires exposées après assainissement au laser Er:YAG. En bas à gauche : récupérations tissulaires à 3 mois postopératoires. Assainissement de l’environnement implantaire.

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