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Le laser Delta Cube : un laser diode multi-longueur d’ondes Principales indications cliniques – Partie II

Laser Delta Cube. (Photo : Erma Electronique)
Pr Dr Jean-Paul Rocca & Pr Dr Carlo Fornaini

Pr Dr Jean-Paul Rocca & Pr Dr Carlo Fornaini

mer. 11 juin 2014

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Dans une publication précédente les principales caractéristiques d’un laser diode, original parce que couplant plusieurs longueurs d’ondes, ont été décrites. Il convient maintenant d’observer son comportement en clinique et de vérifier son aptitude à gérer différentes situations. Nous avions souligné et insisté sur le fait que les lasers diodes ont des indications limitées aux tissus mous (exérèse) et aux seuls traitements de surface des tissus durs (décontamination) sans exérèse. C’est donc dans différentes situations cliniques intéressant ces tissus cibles, que seront discutées les principales applications.

_Chirurgie des tissus mous

Ce type de laser est particulièrement utile dans les cas de néoformations bénignes, ulcérations, pigmentations. Les principales indications, de façon non-exhaustive, concernent les tumeurs bénignes du tissu épithélial (papillomes, hyperplasies épithéliales focales, verrues vulgaires), les tumeurs bénignes du tissu connectif (fibromes), du tissu adipeux (lipomes) et du tissu vasculaire (hémangiomes). Dans les exemples suivants la coupe peut-être effectuée :

_soit avec un embout fibré (associant deux longueurs d’ondes 915 et 1 064 nm) en mode contact, avec des énergies affichées variant de 3 à 6 W et des fréquences élevées (20 kHz). Le démarrage de la coupe avec la fibre peut être plus rapide en marquant sur le tissu cible un point noir, à l’aide d’un stylo feutre noir. La fibre ne sera jamais utilisée perpendiculairement à la surface mais quasi tangentiellement avec un angle le plus fermé possible ; 

_soit en mode non-contact avec l’embout droit (vert) ou angulé à 90° (rouge) avec des énergies quasi identiques (3 à 7 W). Dans ce dernier cas le mode utilisé est continu. Il convient en mode continu de déplacer les embouts rapidement sur le tissu cible, pour éviter tout dommage thermique. Le démarrage de la coupe est rapide car au déclenchement de l’irradiation se réalise un pic de 15 W de durée courte (2 secondes).

Quel que soit l’embout utilisé le temps de travail n’excèdera pas 5 secondes pour favoriser la relaxation tissulaire, ce qui permet d’éviter ainsi tout dommage thermique et de vérifier ce qui est réalisé étape après étape, puisque l’irradiation se poursuit jusqu’à la fin de l’intervention. Avec l’habituation aux différents embouts et énergies, le praticien est en mesure de « s’échapper » de ces contraintes. Sans anesthésie par infiltration la coupe est possible (anesthésique de contact) mais avec des énergies très basses, ce qui allonge de façon significative le temps de travail.

Un cas particulier mérite d’être détaillé : celui des hémangiomes. La thérapie repose sur la déshydratation forcée avec photocoagulation induite. En aucun cas il ne peut s’agir de coupe. L’irradiation se fait avec l’embout hémostase (violet) en mode continu, avec des énergies affichées d’environ 3 W et sans anesthésie, pour pouvoir contrôler l’échauffement. Petit à petit la lésion change de couleur et devient blanchâtre et aplanie, pour finir par ressembler à un escarre qui sera progressivement substitué par du tissu sain. Si l’énergie utilisée se révèle trop élevée, au lieu de manipuler l’écran, il suffit de s’éloigner du tissu cible (ce qui diminue la fluence), puis de retourner à proximité, et ainsi de suite. Le port de lunettes de protection est obligatoire pour le patient, le praticien et l’assistante.

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_Ulcérations

C’est le cas des aphtes et de l’herpes simplex. Il ne s’agit pas ici d’exérèse mais d’irradiation de surface. Dans le cas des aphtes, le plus souvent récurrents, l’effet antalgique après irradiation est rapide (embout violet, 3 W, mode continu, sans contact, focalisé puis défocalisé et focalisé à nouveau). En fin d’irradiation la surface irradiée devient blanchâtre. On peut aussi utiliser la fibre (embout jaune) mais le temps clinique sera allongé car la surface irradiée plus petite. On peut enfin utiliser l’embout blanc (laser basse énergie) pour gérer la seule symptomatologie (3 séances par semaine, 120 secondes par séance, 0,5 W, mode continu). Les meilleurs résultats sont obtenus en combinant embout violet, puis blanc. Le même protocole est utilisé pour la gestion des herpes. Lorsqu’ils sont de petite taille, la fibre (embout jaune) peut être utilisée en mode non-contact. La plupart du temps en présence de vésicules herpétiques, l’irradiation est arrêtée dès lors que les vésicules deviennent blanchâtres. La présence de traces de carbonisation peut parfois être observée. Le taux de succès augmente lorsque le patient consulte et qu’il a identifié les prodromes.

_Chirurgie préorthodontique


Frénectomies

L’indication étant posée, le laser Delta Cube peut être utilisé de différentes façons qui dépendent essentiellement de la localisation et de l’aspect de ces freins (large vs. étroit). Les freins vestibulaires, dont le trajet est le plus souvent large, peuvent être gérés soit avec l’embout fibré   (3 à 6 W, 20 KHz, fibre de 300 ou 400 μm) en mode contact, mais aussi avec les embouts destinés à la coupe en mode non-contact ou focal (vert droit ou rouge angulé). Pour les freins linguaux dont le trajet est généralement mince, l’embout fibré (jaune) est le plus adapté car il peut travailler en mode contact, ce qui facilite la gestuelle. L’anesthésie est utile pour respecter des temps de travail clinique acceptables, mais lors de l’infiltration on doit veiller à n’utiliser que de petites quantités de solution (un quart à un sixième de carpule), afin que le trajet du frein soit de lecture facile. L’attache linguale est disséquée de proche en proche et l’attache face interne de la gencive attachée linguale, souvent en forme de « patte d’oie » est elle aussi disséquée. On portera attention à ne pas laisser de fibre résiduelle, faute de quoi une restitution partielle pourrait être observée. Des traces de carbonisation peuvent être observées et seront éliminées à l’aide d’une gaze humide.

Hyperplasies, hypertrophies

Le plus souvent lié, en présence d’appareillage multibagues, à des problèmes d’hygiène, l’intervention de réduction gingivale permet d’éviter le recours à la chirurgie traditionnelle. Pour éviter d’irradier les structures dentaires, une languette métallique ou un morceau de matrice métallique sera inséré entre le tissu gingival et la dent. L’irradiation se fera en tenant la fibre le plus tangentiellement possible. Les paramètres utilisés varient de 3 à 6 W (énergie affichée),        20 kHz avec une fibre de 300 μm.

Décontamination en endodontie et parodontie

En parodontie les principaux avantages de l’utilisation d’un laser diode concernent l’effet antibactérien, l’élimination de l’épithélium sulculaire infecté et du tissu de granulation, l’effet biostimulant et antioedemateux. Ces effets reposent sur l’absorption de ces longueurs d’ondes par les couleurs foncées (rouge foncé, marron, noir). C’est la raison pour laquelle de nombreux auteurs proposent d’irriguer la poche avec des agents antiseptiques, comme la bétadine ou le bleu de méthylène. Ces agents non seulement ont un effet antiseptique mais ils peuvent surtout se lier à la paroi des bactéries et les rendre plus sombres, ce qui facilite l’absorption de ces deux lumières infrarouges. La solution d’irrigation est portée à l’aide d’une micropipette, et la fibre (300 ou 400 μm) est placée en fond de poche, parallèle au grand axe de la dent. L’irradiation est effective (2 à 3 W, 10 à 50 Hz) et 5 à 6 passages de 5 secondes chacun sont suffisants, la fibre remontant lentement vers la portion coronaire. Entre chaque passage, laisser un temps de repos d’environ 10 secondes, afin d’éviter tout dommage thermique sur les tissus adjacents. Certains auteurs préfèrent irriguer à l’aide d’eau oxygénée 10 volumes, afin de permettre la libération d’oxygène singulet.

En endodontie et en particulier en présence de nécroses pulpaires, l’objectif est l’élimination du paramètre bactérien dans les trois dimensions de l’espace canalaire. Lors du cathétérisme puis de la préparation canalaire, tout est réalisé sous irrigation abondante d’hypochlorite de sodium. Mais la création d’un enduit pariétal est la règle. Il faut donc utiliser un chelatant (EDTA 17 % ou acide citrique 11 %) pour éliminer cette couche d’enduit et ouvrir les tubules dentinaires, les canaux accessoires et pulpo-parodontaux, les anastomoses. Le protocole proposé est le suivant :

_Préparer le canal sous irrigation d’hypochlorite de sodium (2,5 % à 5,25 %).

_Irriguer le canal à l’aide d’hypochlorite de sodium en fin de préparation et à ce moment, placer la fibre de 400 μm ou 300 μm à la longueur opératoire, moins 2 mm.

_Irradier en remontant vers la portion coronaire. (fréquence 20 kHz, énergie affichée 1 à 2 W).

Le résultat consiste à obtenir une décontamination du canal principal (cinq passages en renouvelant l’irrigant). Puis, il convient d’irriguer le canal à l’aide d’un chelatant (EDTA 17 % ou acide citrique 11 %), en utilisant les mêmes paramètres. L’objectif en est l’élimination de la couche d’enduit.

_Irriguer les canaux accessoires, à l’aide d’hypochlorite de sodium pour décontaminer en trois dimensions. Même protocole d’irradiation.

_Sécher à l’aide de pointes de papier stériles.

Les paramètres utilisés sont : temps d’irradiation de 5 secondes, 5 passages pour chacune des trois séquences, soit un temps de travail du laser de:5x5x3=75secondes d’irradiation par canal. L’utilisation d’une fréquence élevée (20 kHz) crée à l’intérieur du canal, des micro-courants acoustiques, favorisant la rupture des parois bactériennes.

Lors de la phase d’obturation canalaire et une fois le maître-cône ajusté, Il est possible à l’aide du delta Cube et de son embout fibré, de ramollir la gutta percha en mode contact (fibre de 300 ou 400 μm, 2 à 3 W, 20 kHz), afin de procéder à la condensation verticale avec les fouloirs adaptés. Il est conseillé alors d’utiliser des cônes de gutta de bonne qualité, c’est-à-dire pauvres en oxyde de zinc. Enfin, dans le cadre des retraitements l’association de ces deux longueurs d’ondes (915 nm et 1 064 nm) permet d’éliminer les ancrages en fibre de carbone (noirs), avec des énergies affichées de 3 à 5 W et une fibre de 300 ou 400 μm.

Hypersensibilité dentinaire

Après repérage des zones à traiter, enregistrement du degré d’hypersensibilité (test au froid, utilisation de la réglette VAS), la surface à irradier est colorée en noir à l’aide d’un crayon gras de type HB. L’irradiation (0,5 W à 0,75 W maximum) se fait avec une fibre de 300 μm (énergie affichée 0,5 W, fréquence 10 Hz) en tenant la fibre le plus tangentiellement possible à la surface, et en évitant d’irradier perpendiculairement à cette même surface. Le degré d’hypersensibilité est alors réévalué. Un deuxième passage peut être nécessaire. On obtient une fermeture partielle ou totale des tubules dentinaires, conséquence de l’effet thermique. La durée de vie de la couche irradiée est d’environ 6 mois à une année. Il convient de ne pas pratiquer d’anesthésie, au motif que le contrôle de l’efficacité ne serait plus possible. L’irradiation peut être parfois sinon douloureuse du moins « agaçante » à « déplaisante ». Respecter des temps de repos.

_Laser diode et prothèse

Préparation corono-périphérique

En premier lieu, et sans qu’il s’agisse d’allongement coronaire au sens strict sachant que ces longueurs d’ondes ne sont pas absorbées par le tissu osseux, il est possible avec ce laser, de pratiquer l’exérèse de tissus mous qui peuvent gêner la préparation corono-périphérique en prothèse fixée. Dans ce cas précis les embouts servant à la coupe (vert droit, rouge angulé) seront utilisés (3 à 6 W, mode continu en respectant des temps de repos tissulaire)et si l’accès est difficile, l’embout fibré peut l’être tout aussi bien.

Une fois la préparation corono-périphérique réalisée, afin de faciliter la prise d’empreinte, la préparation du sulcus peut être engagée avec l’embout fibré. La fibre (300 ou 400 μm) est placée parallèlement au grand axe de la dent et est déplacée en mode contact avec le tissu gingival. Les paramètres utilisés sont : énergie affichée 1 à 2 W, fréquence 50 Hz. L’irradiation engagée, la fibre est déplacée par des mouvements circulaires autour de la préparation (moignon). L’ouverture sulculaire est obtenue rapidement, sans saignement. Quelques traces de carbonisation peuvent apparaître et seront éliminées par passage d’un coton tige humide. L’empreinte peut alors être prise. La faible récession gingivale observée cicatrisera et retrouvera sa position initiale en quelques jours.

Approfondissement vestibulaire

Cette intervention est indiquée essentiellement en prothèse amovible complète en particulier lorsque, pour des raisons budgétaires, la pose d’implants ne peut être envisagée. On sait en effet que la stabilité d’une prothèse amovible complète peut être perturbée par une insertion trop crestale de faisceaux musculaires très toniques. L’excision de ces structures est donc nécessaire. Une prothèse complète provisoire ou transitoire doit être prête, afin de gérer au mieux la période de cicatrisation. Les embouts servant à la coupe (vert droit, rouge angulé) seront utilisés avec des énergies affichées de 3 à 7 W en mode continu. Rappelons qu’avec ces embouts, un pic d’énergie de 15 W est délivré au démarrage de l’irradiation et pour une durée très courte (2 secondes). Le tracé d’incision étant effectué, il convient de rebaser la prothèse existante à l’aide d’une résine molle de type Silagum®, et ce pour une cicatrisation tissulaire guidée. Afin de gérer la symptomatologie postchirurgicale dans des conditions acceptables, la prescription d’antalgiques doit s’envisager pour des périodes pouvant aller jusqu’à 7–10 jours.

Épulis fissuré

Le port de prothèse amovible complète ou partielle peut générer, pour des causes diverses, des épulis fissurés qui rendent le port de ces prothèses au minimum inconfortable et parfois impossible. L’exérèse de ces pathologies devient alors la règle. Cette exérèse est manifestement plus facile à l’aide de la pièce à main fibrée, une fréquence plutôt élevée (100 Hz) et une énergie affichée d’environ 4 à 6 W. Pour faciliter la coupe, cet épulis fissuré doit être soulevé, afin de dégager la base soit à l’aide d’une pince à clamper, soit avec un fil de suture. La prothèse existante sera immédiatement rebasée avec une résine molle, et rebasée ou refaite après cicatrisation.

Éclaircissement dentaire

Après nettoyage et polissage des dents et insertion d’un écarteur de bouche, la protection gingivale est polymérisée conventionnellement. Le gel d’éclaircissement est alors appliqué avec des épaisseurs suffisantes. Pour une parfaite absorption par le gel et en particulier s’il est très clair, rajouter au cours de sa préparation une goutte de Bétadine®, ou un colorant alimentaire rouge, qui donnera une couleur plus sombre. L’irradiation (embout blanc, mode continu, énergie affichée 2 W à 4 W) ne durera pas plus de 30 secondes par dent en déplaçant sans cesse l’embout à quelques millimètres de la surface du gel.

Laser basse énergie, biomodulation

On sait que les mécanismes d’action des lasers à basse puissance sont liés à des réactions photochimiques, produites par des énergies faibles, couplées à des temps d’application plus longs que ceux utilisés, par exemple, lors d’actes chirurgicaux. Cette longueur d’onde (635 nm, visible, rouge) a été testée pour la régénération tissulaire. Son application sur le tissu cible permet d’augmenter la vitesse des processus de réparation, et les phénomènes d’angiogénèse. De plus, l’application de cette longueur d’onde relève aussi de l’analgésie et peut être utilisée comme anti-inflammatoire.

Après tout acte chirurgical en particulier, mais aussi dans la gestion de pathologies aussi diverses que les douleurs articulaires (ETM), les névralgies du trijumeau, myalgies et même hypersensibilités dentinaires ou la gestion des aphtoses et herpes simplex, les lasers à base énergie sont utilisés. Avec l’embout blanc des puissances maximum de 0,5 W (915 nm) et de 0,05 W (650 nm) sont utilisées et requises en mode continu, pour des périodes d’irradiation de 30 à 120 secondes. En général, trois séances chacune permettent de gérer un grand nombre de cas cliniques.

_Conclusion

Ce laser a montré qu’il était efficace pour traiter des situations cliniques diverses, très intéressant du point de vue ergonomique car les embouts peuvent être changer rapidement et facilement. Sa performance chirurgicale est excellente, il est possible d’utiliser la LLLT et de faire des blanchiments dentaires. Il représente une nouvelle façon d’utiliser la technologie laser en odontologie.

Note de la rédaction : cet article est paru dans le magazine DT Study Club, Vol.2, numéro 2, juin 2014.

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