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Restauration de dents traitées endodontiquement : un abord sous l’angle technique

Différence d’intensité des contraintes et emplacement selon la hauteur de ferrule pendant la charge occlusale (Libman).
Dr Gregori M. Kurtzman

Dr Gregori M. Kurtzman

ven. 6 mars 2015

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L’identification et la négociation des canaux avant l’instrumentation de la dent et son obturation est une condition essentielle de réussite clinique. Mais la restauration proprement dite d’une dent traitée endodontiquement est primordiale pour la réussite thérapeutique à long terme. Il ne sert à rien de terminer la phase endodontique du traitement si la dent ne peut être restaurée. C’est pourquoi il nous faut envisager la phase de restauration sous un angle technique. Que faut-il faire pour renforcer la structure dentaire résiduelle, afin qu’elle puisse supporter les charges répétées résultant de la mastication ? Quand utiliser des tenons, quels sont les meilleurs matériaux, quelle est l’importance de la ferrule en dentisterie adhésive. Répondre à ces questions, tel est le but de cet article.

_La ferrule : quelle importance lui accorder aujourd’hui ?

La ferrule a longtemps été une notion fondamentale en dentisterie, mais le développement des adhésifs l’a quelque peu discréditée. Et pourtant, le concept est toujours aussi important aujourd’hui qu’il ne l’était avant les techniques de collage dentaire. Maintenant, qu’est-ce qu’une ferrule ? Ce terme désigne la structure dentaire circulaire qui délimite le pourtour de la structure dentaire résiduelle au niveau cervical,un peu comme les bandes métalliques qui cerclent un tonneau et maintiennent les douves. Il est nécessaire de disposer d’une hauteur suffisante de structure dentaire qui, une fois entourée par la future couronne prothétique, permettra d’obtenir un effet de cerclage, désigné par « effet ferrule ». Il a été démontré que cet effet réduit sensiblement l’incidence des fractures dans les dents traitées endodontiquement.1, 2

Un aspect important de ce concept est la ligne de finition des limites marginales de la couronne dentaire, qui peut être une préparation en chanfrein ou en épaulement. Vu qu’une limite chanfreinée présente une surface oblique non parallèle à l’axe vertical de la dent, elle ne contribue pas vraiment à la hauteur de la ferrule. Dès lors, si un chanfrein est préparé, il est nécessaire de disposer d’une hauteur supplémentaire (1 mm) entre la limite marginale, et le sommet de la partie coronaire de structure dentaire résiduelle. L’utilisation d’un chanfrein peut ne pas être la finition idéale des limites marginales lors de la restauration de dents traitées endodontiquement, ou d’éléments auxquels il manque des parties importantes de structure dentaire. Étant donné la tendance actuelle à l’utilisation de systèmes de numérisation et de fraisage des prothèses fixées, que ce soit au cabinet dentaire ou au laboratoire, il convient de noter qu’il est difficile de scanner l’angle interne d’un épaulement, et il est généralement recommandé de réaliser un épaulement à angle interne arrondi. Un épaulement courbe offre une hauteur maximale de paroi verticale au niveau de la limite marginale,associée à un angle interne légèrement arrondi plutôt qu’à 90 degrés, ce qui garantit une meilleure reproduction des limites marginales, lors de la numérisation et du fraisage.

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Certaines études semblent indiquer que si une ferrule est certainement souhaitable, elle ne doit pas être obtenue aux dépens de la structure dentaire/radiculaire résiduelle.3 D’un autre côté, il a aussi été démontré que la différence entre une restauration efficace sur le long terme et une restauration défaillante, peut se jouer sur 1,0 mm seulement de structure dentaire supplémentaire qui, après cerclage grâce à la ferrule, assure une meilleure protection. S’il n’est pas possible de réaliser une telle restauration fonctionnelle et durable de manière prévisible, un allongement coronaire chirurgical par résection osseuse peut permettre l’obtention d’une structure dentaire suffisante pour créer une ferrule. Cette solution dépend néanmoins de l’état parodontal de la dent, et lorsque la ferrule ne peut être obtenue de la sorte, il y a lieu d’envisager une extraction.4 Ichim et al. se sont exprimés succinctement à ce propos : « L’étude confirme qu’une ferrule accroît la résistance mécanique d’une restauration coronaire/ corono-radiculaire ».5

_La ferrule : quelle doit être sa taille ?

Lors de la reconstitution d’une dent traitée endodontiquement, il est préférable de conserver toute la dentine disponible, même de fines lamelles. Ces dernières assurent une liaison solide entre le faux moignon et la racine dentaire, ainsi qu’entre la couronne et la racine.6 Il faut tenter de conserver autant de structure dentaire que possible, ce qui facilite la réalisation de la ferrule et contribue au maintien de la résistance de la région cervicale, où les contraintes se concentrent. Sous l’effet des forces masticatoires, les contraintes convergent en effet vers cette région et il est donc important d’éviter une surpréparation de cette partie de la dent pendant le traitement endodontique, ainsi que de préserver cette zone pendant la restauration (Fig. 1).

De nombreuses études portant sur la taille requise de la ferrule ont conclu que les restaurations dentaires présentant une ferrule d’au moins 2,0 mm ont un pronostic largement plus favorable, en termes de durée, que celles dont la ferrule est moindre ou absente. Selon Libman et al., « la fatigue due aux charges cycliques de restaurations par reconstitution corono-radiculaire coulées et couronnes de recouvrement total, réalisées avec différentes finitions de ferrule, indique incontestablement la nécessité de préparer la couronne avec une ferrule d’au moins 1,5 à 2,0 mm de hauteur. Les préparations pourvues de ferrules de 0,5 mm et 1,0 mm ont mené à une fracture après un nombre sensiblement inférieur de cycles, par rapport aux ferrules de 1,5 mm et 2,0 mm et aux dents témoins ».7 Libman a en outre démontré que, sous l’effet de charges hors axe (comme c’est le cas dans la région antérieure du maxillaire), la limite marginale de la restauration située du côté d’où provient la charge, est sous tension, alors que le côté opposé est sous compression (Fig. 2). Ces charges et microcontraintes répétitives dues à la tension sur la face linguale, mènent à l’ouverture de la limite marginale de la restauration et donc éventuellement, à une récidive carieuse et/ou à une rupture du scellement endodontique ou de la restauration (Fig. 3).

De plus, si l’on se réfère aux études de contrainte menées par Libman et d’autres, comparant des ferrules de différentes hauteurs, on constate qu’en présence d’une ferrule de 0,5 mm, il existe des contraintes plus importantes au niveau de la limite marginale sous tension, qui se concentrent au milieu de la dent, où le faux moignon ou le tenon sont situés. Les dents pourvues d’une ferrule de 2,0 mm, présentent sensiblement moins de contraintes exercées sur les limites marginales ou au centre de la région cervicale. Moins il y a de contraintes au centre de la région cervicale, moins il y a de risque de surcharge et de rupture de la restauration (Fig. 4).

_Détection d’une défaillance du joint coronaire

Lors d’une visite de rappel ordinaire, il n’est pas rare qu’un praticien ou un hygiéniste détecte une carie récidivante à la limite marginale de la couronne, tandis que le patient n’en avait quant à lui aucune conscience. La situation se complique davantage lorsque les dents ont déjà subi un traitement endodontique, car aucune pulpe n’est présente pour lancer un signal douloureux au patient, qui ne se rendra compte d’un problème présent, qu’au moment de l’apparition d’un processus carieux important ou du détachement de la couronne prothétique de la structure dentaire résiduelle.

Dans leur étude publiée, Freeman et al. ont mentionné que « la fatigue due aux charges cycliques de trois types différents de reconstitution corono-radiculaire associée à une couronne de recouvrement total coulée, mène initialement à un problème de percolation cliniquement indétectable, entre la restauration et la dent ».8 La littérature indique que la percolation coronaire peut être un facteur majeur d’échec du traitement endodontique.9-11 Comme indiqué précédemment, sous les charges dues à la mastication, des limites marginales pourvues d’une ferrule inadaptée peuvent présenter sur le côté sous tension des micro-ouvertures qui, avec le temps, entraîneront une percolation. Cette situation peut être perçue comme une récidive carieuse mais lorsque le phénomène gagne en profondeur et conduit à une exposition du matériau d’obturation, il peut s’ensuivre un échec du traitement endodontique, dû à la migration apicale des bactéries buccales. Le dommage est minimisé en présence d’un moignon coronaire collé, ou d’une reconstitution corono-radiculaire, mais après un certain temps sans ferrule de hauteur suffisante, le matériau endodontique ou la restauration finiront par se fracturer.

_Les tenons : ont-ils tous la même fonction ?

Les dents fonctionnent différemment, selon le matériau dont le tenon est fabriqué, car la distribution des charges dans la racine dépend du module d’élasticité du tenon, par rapport à celui de la dentine radiculaire (Fig. 5). Lorsqu’une dent restaurée avec un tenon fibré se fracture en raison d’une surcharge, le type de défaillance est de nature coronaire, protégeant la racine et la structure dentaire résiduelles.12 Ce type de défaillance des dents restaurées par tenon fibré, permet généralement de reconstituer la dent, car il se produit rarement une fracture radiculaire verticale.

Bitter a rapporté que « par comparaison avec les tenons métalliques, les tenons en composite renforcé de fibres (CRF) démontraient une résistance moindre à la fracture in vitro, ainsi qu’un type de défaillance généralement restaurable »13 (Fig. 6). Mais bien que pour les tenons métalliques, coulés ou préfabriqués, le seuil de fracture était plus élevé pour les reconstitutions corono-radiculaires coulées, 91 pour cent des spécimens présentaient des racines fracturées. Aucun des spécimens à tenon fibré ne présentait de fracture radiculaire ; les fractures des reconstitutions corono-radiculaires se situaient généralement au niveau de l’interface du moignon composite et de la dent.14

Lorsque les contraintes se concentrent au niveau de l’apex du tenon métallique en raison de son module d’élasticité plus élevé que celui de la racine environnante, une fracture radiculaire verticale survient fréquemment (Fig. 7). Celle-ci peut également résulter de la dégradation du ciment de scellement entre le tenon et la racine, menant à un micro-glissement du tenon dans la dent sous l’effet des charges, qui crée un moment de torsion dans la région cervicale et entraîne une fracture radiculaire verticale. Vu que les tenons métalliques sont plus rigides (module d’élasticité plus élevé) que la dentine radiculaire, les contraintes se concentrent sur leur apex, et mènent à une fracture radiculaire verticale, ainsi qu’à la perte catastrophique de la dent. Selon Ansari, « le risque de fracture était plus important avec les tenons métalliques coulés (fracture de neuf tenons métalliques sur 98), qu’avec les tenons en fibres de carbone (dans ce groupe, aucune fracture n’a été observée sur les 97 tenons utilisés) »,15 mais les tenons fibrés ayant une flexibilité égale ou supérieure à celle de la racine (module d’élasticité plus faible), les contraintes se concentraient à hauteur de la région cervicale et entraînaient une fracture horizontale de la reconstitution corono-radiculaire ; et généralement, il était possible de sauver la dent.

Le module d’élasticité désigne la rigidité relative du matériau. Plus le matériau est rigide, plus son module est élevé. Lorsque deux matériaux différents sont simultanément présents, comme c’est le cas lorsqu’un tenon est placé dans une racine dentaire, le module d’élasticité est dicté par le matériau le plus rigide. Le module d’élasticité moyen de la dentine est de 17,5 (+/- 3,8) GPa, et de 24,4 (+/- 3,4) GPa pour les tenons en fibres de verre, 66,1 (+/- 9,6) GPa pour les tenons préfabriqués en titane, 108,6 (+/- 10,7) GPa pour les tenons préfabriqués en acier inoxydable et 53,4 (+/- 4,5) GPa pour les tenons coulés en or de classe « high noble », selon les spécifications de l’American Dental Association. Les tenons coulés fabriqués dans des métaux de classe « noble » ou « base », toujours selon les spécifications de l’American Dental Association, ont un module plus élevé que les alliages de classe « high noble », et leur rigidité relative est presque similaire à celle des tenons préfabriqués en acier inoxydable. Les tenons fibrés possèdent un module d’élasticité qui correspond davantage à celui de la dentine (Fig. 8). La résistance en flexion des tenons fibrés et métalliques est respectivement quatre et sept fois supérieure, à celle de la dentine radiculaire, et il existe toujours une polémique sur l’efficacité d’un tenon pour renforcer la dent.16,17 La finalité fondamentale d’un tenon est de favoriser la rétention du faux moignon.

Une étude a démontré que l’absence d’une ferrule au niveau de la limite cervicale, constituait un facteur négatif déterminant, responsable de niveaux de contrainte considérablement plus élevés dans la racine. Si aucune ferrule n’était présente, l’association tenon préfabriqué en métal/composite était à l’origine de contraintes plus importantes

Dans la région cervicale, que les reconstitutions corono-radiculaires coulées. Néanmoins, la ferrule semblait bien annuler l’effet mécanique du matériau de reconstruction, sur l’intensité des contraintes. En présence d’une ferrule, le choix du matériau de reconstitution n’avait aucune incidence sur le niveau de contrainte dans la région cervicale. Le tenon radiculaire, dont la finalité est de protéger la région cervicale, s’était également révélé bénéfique, même dans le cas d’une dentine coronaire résiduelle suffisante. Si un tenon radiculaire était en place, les niveaux de contrainte dans la région cervicale ,étaient moins élevés qu’en l’absence d’un tel tenon. Selon la conclusion de Pierrisnard, plus le module d’élasticité est élevé et plus les niveaux de contrainte sont bas.18

Le matériau dont le tenon est fabriqué doit avoir le même module d’élasticité que la dentine radiculaire, pour distribuer les forces appliquées le long de la longueur du tenon et de la racine, et ne pas les concentrer sur l’apex du tenon. D’après les études, il ressort que si des charges sont appliquées sur des éléments de rigidité différente, l’élément le plus rigide est capable de résister aux forces sans distorsion. Lorsque le matériau le plus rigide est le tenon, ces forces sont concentrées au niveau de son apex. L’élément le moins rigide se fracture invariablement, lors de l’utilisation d’un tenon plus rigide que la dentine radiculaire.19 Les tenons dont le module d’élasticité est largement supérieur à celui de la dentine, créent des contraintes à l’interface dent/ ciment/tenon, associées à la séparation éventuelle et la fracture du tenon. Lorsque des charges répétées sont appliquées sur la dent restaurée endodontiquement, le ciment peut se dégrader au niveau de l’interface du tenon métallique et de la dentine radiculaire, permettant un micro-glissement du tenon. Ce phénomène entraîne l’application de contraintes plus élevées sur la racine, qui mènent à une fracture radiculaire verticale et à une perte catastrophique de la dent. Le module plus élevé (rigidité) des tenons métalliques les rigidifie et les rend inaptes à absorber les contraintes. En outre, la transmission des forces occlusales et latérales au travers d’une reconstitution corono-radiculaire métallique, peut concentrer les contraintes et être à l’origine d’une possible fracture radiculaire très défavorable.20 Le module d’élasticité de la dentine est de l’ordre de 14 à 18 GPa, celui des tenons fibrés varie d’environ 9 à 50 GPa, selon le fabricant du tenon.

Ceci offre une similarité d’élasticité entre le tenon fibré et la dentine radiculaire, et permet l’obtention d’une flexion du tenon assez comparable à celle de la dent. Le tenon fibré absorbe et distribue les contraintes et les transmet donc moins à la racine.21 La disposition longitudinale des fibres dans le tenon fibré et le module d’élasticité inférieur ou égal à celui de la dentine, pourrait mener à une redistribution des contraintes dans la dent, à l’opposé de l’épaulement chanfreiné, et augmenter la probabilité d’une fracture de l’interface reconstitution corono-radiculaire/racine plutôt que des fractures radiculaires. Lorsque la rupture n’est pas due à une surcharge, elle survient généralement dans la partie coronaire et entraîne souvent une fracture du faux moignon au niveau de l’interface dentaire, ce qui permet une nouvelle restauration de la dent et évite sa perte catastrophique.2

Les propriétés de flexion des tenons fibrés se sont révélées bien meilleures que celles des tenons métalliques et comparables à celles de la dentine.23 Alors que les tenons préfabriqués en acier inoxydable présentaient une résistance à la fracture considérablement plus élevée au moment de la défaillance, par comparaison aux tenons fibrés, le type de fracture des tenons en fibres de carbone, s’avérait plus favorable à la structure dentaire résiduelle, comparativement aux tenons préfabriqués en acier inoxydable et aux tenons en céramique.24 Les tenons en céramique ont été introduits avant les tenons fibrés comme solution de remplacement plus esthétique que les tenons métalliques préfabriqués, et bien que leur utilisation ne se soit pas généralisée de nos jours, ils sont toujours disponibles. Le module d’élasticité des tenons en céramique varie de 170 à 213 GPa, soit une valeur approximativement 15 fois plus élevée que le module de la dentine. Étant donné que ces tenons en céramique sont trop rigides et transmettent davantage de contraintes au canal radiculaire que les tenons fibrés, menant à des lésions radiculaires irréversibles par le biais de fractures radiculaires verticales semblables à celles que l’on observe avec des tenons métalliques, leur utilisation n’est actuellement pas recommandée pour la restauration de dents traitées endodontiquement.25

_Décider de la restauration de dents traitées endodontiquement

La restauration de dents traitées endodontiquement exige de considérer techniquement la façon la plus favorable de reconstruire la structure dentaire résiduelle, afin de lui garantir la meilleure survie sur le long terme. À cet égard, le praticien doit classer la dent en fonction de la quantité de structure dentaire native encore présente après le traitement endodontique, et de la quantité de matériau de restauration encore présent dans la dent.

_Absence minimale de structure dentaire ou ancienne restauration de taille minime

Les dents postérieures acquièrent de la résistance lorsque la zone de crête marginale et la face proximale représentent la structure dentaire naturelle et n’ont pas été restaurées. Les dents ayant subi un traitement endodontique – dans une situation où, soit une carie occlusale affecte les puits et sillons avec atteinte de la pulpe, soit une ancienne restauration au composite ou à l’amalgame et de taille petite à moyenne est présente – nécessitent une restauration conservatrice (Fig. 9). Ces dents peuvent être restaurées après élimination du matériau de restauration existant et du matériau d’obturation de la cavité pulpaire, y compris du canal sur une longueur de 2,0 à 3,0 mm.

La mise en place d’un composite classique collé dans la dent fournit une solution de restauration satisfaisante et durable à ces dents, et une couronne n’est généralement pas nécessaire. La préparation d’accès ou la restauration existante, devrait laisser intacte la plus grande partie de la largeur cuspidienne. Lorsque la préparation qui suit l’élimination de la carie et des matériaux de restauration existants envahit la largeur de la cuspide et mène à l’absence de la moitié de cette structure dentaire, une restauration plus importante est indiquée.

_Absence modérée de structure dentaire ou ancienne restauration de taille moyenne

S’il manque à la dent nécessitant une restauration une crête marginale, ou les deux, et si ces zones ont été restaurées auparavant ou le seront, la mise en place d’un composite collé ne sera pas une restauration définitive satisfaisante (Fig. 10). Les crêtes marginales confèrent une résistance à la flexion cuspidienne de la dent et augmentent sa solidité. Lorsque les crêtes sont absentes, la flexion cuspidienne est accrue sous la charge fonctionnelle de la dent et par conséquent le risque de fracture lors de la fonction masticatoire l’est également.

La restauration de ces dents nécessite une reconstitution corono-radiculaire, éventuellement associée à des clavettes ou d’autres éléments de rétention du moignon coronaire, suivie de la pose d’une couronne de recouvrement total. Souvent, des tenons ne sont pas nécessaires car la structure dentaire résiduelle, au niveau des cuspides après préparation de la couronne, est suffisante pour maintenir le moignon coronaire et il est possible de réaliser une ferrule. Un tenon peut être envisagé chez les patients souffrant de bruxisme ou serrant les dents de façon anormale, ou chez les patients présentant une occlusion susceptible de soumettre la dent restaurée à des charges plus importantes, en raison de sa position par rapport au plan occlusal. Lorsqu’une ferrule adéquate ne peut être réalisée, le praticien devrait envisager un allongement coronaire chirurgical par résection osseuse ou égression orthodontique, afin d’en faciliter l’obtention.

Les restaurations sous forme d’inlay doivent être évitées dans les dents traitées endodontiquement, car l’accès créé pour réaliser le traitement canalaire affaiblit la dent sur le plan de la flexion cuspidienne. Un inlay, même collé, peut agir comme un coin qui force l’écartement des cuspides et mener à la fracture de la dent. Une restauration sous forme d’onlay peut être utilisée et elle doit être conçue de sorte à inclure un coiffage des bords, permettant de limiter la flexion des cuspides.

_Absence importante de structure dentaire ou ancienne restauration de grande taille

Ces dents sont un réel défi à restaurer, lorsque l’élimination de l’ancien matériau de restauration et de la carie, conduit à la nécessité de remplacer des quantités considérables de structure dentaire (Fig. 11). Ces dents requièrent la mise en place de tenons pour maintenir le moignon coronaire de la structure dentaire résiduelle.

Étant donné que la finalité des tenons est de maintenir le moignon, il est recommandé de placer un tenon dans chacun des canaux de dents multi-canalaires, afin de fixer le moignon coronaire de part en part de la structure dentaire résiduelle (Fig. 12). Si l’on observe la projection des tenons dans les dents postérieures, on remarque que l’angulation des canaux mène à une convergence des tenons dans la partie coronaire de la dent. Ceci bloque le moignon coronaire et contribue à prévenir une fracture du tenon ou son délogement, lors de la fonction masticatoire, ce que l’on peut observer lors de la pose d’un seul tenon.

L’utilisation de clavettes peut également être envisagée pour favoriser le maintien du moignon coronaire lorsque les cuspides sont absentes, et renforcer les tenons mis en place. Ces dents nécessitent la pose d’une couronne de recouvrement total, pour limiter la flexion cuspidienne sous les charges. Similairement aux dents présentant une absence modérée de structure dentaire, l’utilisation d’inlays devrait être évitée car ils ne restreignent pas la flexion cuspidienne. Un onlay peut si nécessaire être utilisé dans certains cas, mais doit inclure un coiffage des bords dans le cadre du schéma de préparation, afin de limiter la flexion des cuspides. Dans ce cas également, lorsqu’une ferrule adéquate n’est pas réalisable, il y a lieu d’envisager un allongement coronaire chirurgical par résection osseuse ou égression orthodontique, afin d’en faciliter l’obtention.

_Conclusion

Dans le cadre d’une restauration de dents traitées endodontiquement, il est nécessaire de tenir compte de l’aspect technique, afin de garantir la survie à long terme des éléments. La ferrule est souvent négligée dans notre ère moderne de la dentisterie adhésive et pourtant, elle est encore tout aussi importante aujourd’hui qu’elle ne l’était par le passé. Il a été démontré que l’absence de ferrule compromet la conservation de la dent, et la littérature préconise l’utilisation d’une ferrule de 2,0 mm, d’autant plus cruciale dans les dents maxillaires antérieures, en raison de la direction des charges résultant de la mastication.

La manière de restaurer la structure dentaire résiduelle a en outre une incidence sur les problèmes susceptibles de survenir sur le long terme. Les tenons métalliques sont utilisés moins fréquemment, en raison des fractures radiculaires verticales qui se produisent lorsque la dent est soumise à une surcharge, et la tendance s’est de plus en plus orientée vers l’utilisation de tenons fibrés, dont le module d’élasticité est proche de celui des racines. Lorsque les dents restaurées avec un tenon fibré sont soumises à une surcharge, la fracture se produit généralement dans la partie coronaire (supragingivale), laissant suffisamment de structure dentaire pour une nouvelle restauration de l’élément. Les dents présentent rarement une défaillance lorsqu’elles font l’objet d’une technique hyper-sophistiquée. Par contre, bon nombre d’entre elles iront droit à l’échec si la technique est négligée._

 

Note de la rédaction : une liste complète des références est disponible auprès de l’éditeur. Cet article est paru dans le magazine DT Study Club, Vol. 2, numéro 1, mars 2015.

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