DT News - France - Un dentiste qui enfile des gants

Search Dental Tribune

Un dentiste qui enfile des gants

Sepehr Zarinne Centre Surgitech Studies à Saint-Dié-des-Vosges (gitechstudies@gmail.com) - Préparatif.
Marc Revise, Dental Tribune France

Marc Revise, Dental Tribune France

mar. 9 février 2016

Enregistrer

PARIS, France : Dans les années 70, près du café de la Gare, où Coluche vendait ses places de spectacle à la façon « roue de la fortune », Marc Revise a eu la chance de prendre des cours de karaté avec un maître assez spécial et bien connu du grand public. Georges Zsiga était également le professeur de karaté de Thierry Lhermitte et Bernard Giraudeau. On le retrouve dans les couloirs du métro parisien dans une célèbre scène de « Marche à l’ombre » (1984), où il casse la guitare des deux compères. Si j’ai abandonné ce sport depuis bien longtemps, il n’a jamais pour autant dépassionné pour les arts martiaux. C’est probablement cet engouement qui l’a porté à rencontrer le docteur Sepehr Zarrine, notre confrère. Cette rencontre n’a pas eu lieu sur un ring, fort heureusement pour lui.

Marc Revise pour Dental Tribune : Quand nous avions 15 ans et que nous apprenions nos katas, nous passions notre temps à nous entraîner entre deux cours au lycée, et nous ne regardions plus que des films d’arts martiaux. Les films de kung fu ne t’auraient pas, toi aussi, un peu influencé ?

Sepehr Zarrine : En effet, ma passion pour les arts martiaux est née en visionnant pour la première fois un film de Bruce Lee et j’ai démarré le kung fu vers 12 ans puis obtenu ma ceinture noire en rentrant à la faculté. C’est là que j’ai commencé les compétitions.

Ces films montrent à quel point, si ces arts martiaux sont des sports de combat, ils sont aussi chorégraphie où précision et beauté des gestes qui participent à l’émerveillement, au spectaculaire.

Certainement, mais passant en professionnel, les coups deviennent plus durs, plus violents. L’efficacité prime alors sur la beauté du geste pour amener le K.O. ou la blessure, écourter le combat et donner la victoire. C’est une vie intense, adrénalinée, avec des voyages, des rencontres et des challenges physiques et mentaux. Les jours qui précédent un combat me donnent l’impression que ma vie va s’arrêter. Je profite de chaque instant et de mes proches. Quand le combat est gagné, tout prend une autre dimension et pendant plusieurs semaines c’est l’euphorie. Tu ne peux pas imaginer la pression avant de monter sur le ring. Tu vas être tout seul entre les 4 cordes, face à un adversaire surentrainé et tous les regards sont sur le ring. Ton combat peut se transformer en cauchemar. Cette période qui entoure le combat forme une séquence de vie où la plupart des soucis du quotidien perdent de leur importance.

Revenons à ta carrière proprement dite, comment es-tu passé boxeur professionnel alors que tu avais un autre challenge à remporter : tes études de chirurgie-dentaire ?

Je suis né en 1977 à Téhéran, et j’arrive en France à la fin de la guerre Iran-Irak, non pour fuir le pays, mais pour étudier dans de meilleures conditions. Si la priorité est aux études, les entrainements se rajoutent aux cours et aux révisions. Je décroche régulièrement des médailles en championnat et coupe de France, en kung fu combat et je passe une année en équipe de France. Par goût du challenge, je quitte le monde amateur et m’engage sur le circuit professionnel dans les 3 disciplines de boxe pied-poing. J’ai la chance de rencontrer Orlando Wiet, une légende, surnommé le « Gladiateur », qui accepte de me prendre sous son aile — commence alors ma pire période d’entraînement où rythme et intensité me font frôler le malaise à chaque séance.

Tu en es où de tes études à ce moment-là ?

En 2001 quand j’obtiens ma thèse en chirurgie dentaire, commence alors la double carrière professionnelle vhirurgie dentaire et boxe. En 2005, je suis challenger aux championnats du monde de kick boxing à Dubaï et je crée la surprise en remportant la ceinture mondiale par K.O.. Les combats s’enchainent pendant 10 ans avec des hauts, quelques bas. J’ai l’opportunité de décrocher la ceinture mondiale en full contact le jour de mes 30 ans puis la ceinture européenne en boxe thaïlandaise. Malheureusement, je passe à côté de ces combats... Mais en 2014, une nouvelle occasion se présente, et, après une grosse préparation, je remporte un titre mondial en boxe thaïlandaise par K.O. technique, l’adversaire n’étant plus en mesure de continuer le combat suite à ses blessures.

Tu as réussi à concilier cette carrière de sportif professionnel avec le développement de ton activité de chirurgien-dentiste, où tu t’es orienté vers un exercice exclusif en implantologie en 2006. Tu as également créé un centre de formation en implantologie, SurgiTech Studies. Est-ce la fin de ton parcours de boxeur ?

J’ai une cinquantaine de combats professionnels sur le circuit international en kick boxing, boxe thaïlandaise et full contact. Je me sens bien physiquement alors je continue à boxer. Un jour le plaisir ne sera plus là et j’arrêterai. Je me suis spécialisé dans les cas complexes en implantologie ; les formations et les conférences offrant de belles rencontres et des déplacements, cela me permettra une transition plus douce quand j’arrêterai les combats. Mais quand tu es un combattant, tu l’es toute la vie ; mon esprit combatif ne changera pas...

Maintenant que les relations entre l’occident et l’Iran semblent apaisées, projettes-tu de transmettre tes connaissances à Téhéran sous forme de conférences ou en organisant un centre de formation ?

Je suis en effet parti en Iran, le 8 octobre dernier, donner une conférence à Téhéran sur la mise en charge immédiate. Je l’ai faite en persan, ce qui fut un beau challenge. J’en suis très heureux et fier. C’est le début d’une belle collaboration franco-iranienne dans le domaine de la chirurgie implantaire.

Les jeux de Rio approchent, es-tu partant ?

Je l’aurais bien été, mais malheureusement le kick-boxing, la boxe thaï et le full contact ne font toujours pas partie des disciplines olympiques. Sinon j’étais partant à 400 %. Bien qu’ayant été à l’ordre du jour à Pékin, le kung fu n'est toujours pas aux J.O.

Sepehr, tu fais preuve d’un engagement sans concessions, tant du point de vue dentaire que sportif. Cette opiniâtreté t’a permis d’accéder sur le podium de nombreuses fois et t’a propulsé dans l’excellence en tant que chirurgien, au nom de Dental Tribune, permets moi de te féliciter pour cette vie exemplaire. Quel est ton secret ?

Merci. Depuis quelques années, mon temps est partagé entre le cabinet, les formations que je dispense, la boxe et ma vie privée. Je suis obnubilé par le temps qui passe et avoir une vie remplie et marquante, faire les choses à fond, ne rien regretter est mon credo.

Cet interview me laissant K.O., je termine sur ta conclusion. Merci.

To post a reply please login or register
advertisement
advertisement