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Protection du patient en odontologie – Le cadre à digue de seconde génération

Dans le contexte actuel la propagation rapide par voie aérienne du SARS-CoV-2 et de ses variants, oblige à une meilleure protection du patient lors de ses soins buccodentaires. (Photo : Shutterstock/ Belobor)

En odontologie, la promiscuité entre le patient et son praticien pendant ses soins, expose ce dernier a des risques de transmission de germes. Depuis l’épidémie du SARS-CoV-2, les moyens de protection ont été renforcés par des mesures collectives et individuelles sévères, imposées surtout au praticien. Pour le patient, les moyens de protection actuels seront évoqués en insistant sur le champ opératoire, ou digue. L’efficacité de ce dispositif présenté ici, a été améliorée par la modification de l’un de ses deux composants, ou cadre a digue.

Exposé

Au début des années 1982, le virus du sida avait semé la panique dans la population civile et dans le monde médical en particulier. Sachant que ce virus se transmettait par voie sanguine, des mesures drastiques avaient été prises en conséquence. Ces moyens perdurent concernant la stérilisation bien codifiée des instruments, et l’utilisation des matériels à usage unique, qui gardent leur efficacité contre les virus à transmission aéroportée.

Le praticien à titre individuel, doit porter masque, gants, charlotte, sur chaussures, lunettes.

Le patient ne bénéficiait pas de mesures particulières de protection individuelle, les risques de contamination étant jugés réduits durant les soins dispensés, tant à l’hôpital qu’en milieu privé.

La pandémie actuelle crée la même angoisse, entretenue par les plus grands spécialistes, désarmés devant ce nouveau virus. Des mesures collectives ont été mises en place et les mesures individuelles habituelles renforcées, par le port d’un masque et autres nouveaux procédés de protection.

Fig. 1 : Digue en place.

Fig. 1 : Digue en place.

La protection du patient

La protection antimicrobienne se pose différemment pour le patient. La source de contamination par le praticien est en effet improbable du fait de son accoutrement, de sa protection individuelle, de son suivi médical par les tests cliniques et antiviraux, dont il fait l’objet. Même dans le cas où il serait porteur asymptomatique ou faussement négatif aux tests les plus fiables, le patient peut être rassuré.

Pour le patient, sa protection doit être aussi complète que possible car les soins auxquels il est soumis, dans un espace réduit et pollué qu’il partage avec le praticien, qui est saturé de particules variées, faites de débris dentaires voire métalliques, et de germes de toute nature, véhiculés par la turbine, les ultras sons, véritables aérosols hautement septiques.1

À propos des germes. Certains proviennent d’abord de la cavité buccale du patient, à partir de son propre microbiote en cas de dysbiose buccale plus ou moins perturbé par des pathologies parodontales endodontiques et autres stomatites, initiées par des germes opportunistes. À ces sources microbiennes, viennent s’ajouter des germes également commensaux, provenant du rhinopharynx et de l’arbre bronchique, enfin des germes spécifiques lors d’épidémies virales ou bactériennes, à foyer pulmonaire.2 Cette flore variée et active est diffusée par le souffle du patient, qui répand inconsciemment ces germes dans un rayon de l’ordre de plus d’un mètre autour de lui, et sur tout ce qui se trouve sur son passage. Ces gouttelettes retombent forcément sur le patient _ visage, yeux, cheveux, pilosité, et ses vêtements. Si le praticien échappe à ces nuisances, le patient lui, peut être contaminé par les germes dont il était porteur, et dont la charge se trouve augmentée, les rendant pathogènes. Sa protection contre ces aérosols semble donc toute aussi importante que pour le praticien.

Quels sont les moyens de protection du patient

Malgré des risques, surtout infectieux, qui entourent les soins dentaires liés à la saturation de l’air ambiant, le patient ne peut bénéficier d’un masque. Néanmoins, il reste un dispositif datant du siècle dernier : le champ opératoire, réservé à la pratique de l’endodontie ainsi qu’à l’odontologie restauratrice, qui avait pour objectif de protéger le patient d’accidents par déglutition et inhalation d’instruments manuels utilisés par le praticien, de médicaments et autres liquides d’irrigation.3 Le rôle de ce champ opératoire appelé ≪ digue ≫ consistait à isoler la dent à traiter du reste de la cavité buccale, tout en jouant le rôle protecteur du masque, vis à vis du souffle du patient, et de confort durant des séances de soins particulièrement longues.

Description de la digue

Ce dispositif est composé de deux parties :4

– Une feuille de caoutchouc de 15 x 15 cm, percée à la demande et placée autour de la dent à traiter à travers cet orifice, puis fixée au collet de la dent concernée par l’intermédiaire d’un clamp.

– Un cadre destine à tendre la feuille de caoutchouc.

Ce concept a peu évolué à part le cadre qui a été amélioré. Réalisé en métal, il est moins utilisé actuellement, en raisons notamment de son opacité à la radiographie. Il est désormais en matière plastique inaltérable par les effets thermiques de la stérilisation, et les produits chimiques utilisés par le praticien.

Description du cadre – évolution de sa forme 5, 6

Au fil des années le cadre a changé d’aspect. Il se présente sous trois formes principales : le cadre ouvert, le cadre ferme et le cadre articule. Les plus utilisés étant le cadre ouvert HYGENIC (Fig. 2), le cadre ferme de NYGAARD (Fig. 3). Inconvénients de ces deux cadres :

– pour la prise d’un cliche radio, la dépose de la digue est opératoire (Fig. 4) ;

– contre la souillure des vêtements du patient, une aspiration massive endo buccale est nécessaire (Fig. 5).

Fig. 2 : Cadre ouvert. Cadre HYGENIC.

Fig. 2 : Cadre ouvert. Cadre HYGENIC.

Fig. 3 : Cadre fermé. Cadre NYGAARD.

Fig. 3 : Cadre fermé. Cadre NYGAARD.

Fig. 4 : Pour la prise d’un cliché radio la dépose du cadre est obligatoire.

Fig. 4 : Pour la prise d’un cliché radio la dépose du cadre est obligatoire.

Fig. 5 : Contre la souillure des vêtements, une aspiration endobuccale est nécessaire.

Fig. 5 : Contre la souillure des vêtements, une aspiration endobuccale est nécessaire.

Fig. 6 : Le cadre articulé G SAUVEUR.

Fig. 6 : Le cadre articulé G SAUVEUR.

Avantage du cadre articule : le troisième type de cadre est le cadre articule G SAUVEUR plus récent (Fig. 6). Après examen de ces différents cadres en fonction, le champ opératoire le plus proche des services qu’on attend d’un tel dispositif, est le cadre articulé (G Sauveur), plus récent (Prix SPAD) 1987.7

Avantages du cadre articulé7, 8

Ce cadre offre déjà des performances qui peuvent être améliorées :

– il est fermé ;

– il est pliable dans le sens vertical ;

– il permet d’accéder à la cavité buccale :

・ pour une aspiration massive en cas d’urgence (salive, liquides d’irrigation, medicaments) ;

・ pour une radiographie rétro-alvéolaire sans avoir à déposer la digue ;

– il arrive à hauteur du nez volontairement épargné pour le confort du patient.

Fig. 7 : Avec le cadre articulé, la prise et le cliché radio sont facilités.

Fig. 7 : Avec le cadre articulé, la prise et le cliché radio sont facilités.

Fig. 8 : Une aspiration massive et urgente possible.

Fig. 8 : Une aspiration massive et urgente possible.

Fig. 9 : Feuille de digue avec gouttière à sa base.

Fig. 9 : Feuille de digue avec gouttière à sa base.

Fig. 10 : Cadre articulé modifié.

Fig. 10 : Cadre articulé modifié.

Modifications apportées

1) Augmentation de la hauteur du cadre de 2 cm, de façon à couvrir les orifices narinaires (Fig. 10).

2) Modification de la structure de la partie inférieure du cadre (Fig. 11) :

– En transposant le méplat existant côté vestibulaire en position linguale, de façon à recueillir plus facilement les liquides provenant des différents appareils et les liquides d’irrigation.

– En ajoutant deux supports de crépine solidarisés au méplat de façon à :

・ déplacer la pompe à salive de la bouche du patient à la crépine, et permettre une aspiration constante des liquides ainsi recueillis, hors de la cavité buccale ;

・ décharger le praticien de cette opération ;

– éviter l’écoulement de ces liquides sur le patient (Fig. 12).

3) Modification de la feuille de digue, par augmentation de la dimension d’un cote de la feuille de + 4 cm. L’une des extrémités dans le sens de la longueur aura été préalablement repliée sur 3 cm en forme de gouttière, et collée sur les deux côtés, de manière à faire office de réceptacle étanche (Figs. 9, 12, 13). Le nouveau cadre en fonction II est nécessaire de porter une charlotte, des lunettes, un champ sur le corps (Fig. 10). La figure 14 montre la protection des narines – cadre non plié, la figure 15  – cadre plié. Peut-on améliorer la qualité de l’air ? Certains locaux sont munis d’épurateurs d’air plus efficaces qu’une aération d’un quart d’heure entre chaque patient, pour de nombreuses raisons. Le volume de ce dispositif relativement réduit peut être installé dans l’espace de travail.

Conclusion

Dans le contexte actuel la propagation rapide par voie aérienne du SARS-CoV-2 et de ses variants, oblige à une meilleure protection du patient lors de ses soins buccodentaires.

Parmi les moyens mis en œuvre, le champ opératoire ou digue, a subi des modifications au niveau du cadre de façon à répondre aux exigences d’une meilleure protection du patient.

Le patient doit être protégé lors des soins bucco-dentaires. Les gouttelettes se répandent dans un rayon de deux mètres, et ne contiennent pas que des virus. Des germes peuvent provenir du patient lui-même, et les risques de contamination augmentent avec la charge virale des agents transmetteurs. Un microbiote buccal déséquilibré est aussi une source de contamination via les aérosols.

Des particules organiques et minérales sont libérées et diffusées lors des soins. Ces germes sont véhiculés par la respiration, et les particules retombent et se déposent sur le patient. Le port d’une charlotte, de lunettes étanches et d’un champ de protection sur le patient sont indispensables. La digue est un moyen de protection du patient incontournable et de confort pour le patient et le praticien, durant ces séances particulièrement longues, surtout en endodontie.

Note éditoriale:

Cet article a été publié dans le journal Dental Tribune France février/mars 2022 vol. 14, no. 2+3.

Bibliographie
1 Cochran MA, Miller CH, Sheldrake MA. The efficacy of the rubber dam as a barrier to the spread of microorganisms during dental treatment, J Am Dent Assoc. 1989 Jul;119(1):141-4.
2 Forrest WR, Perez RS. The rubber dam as a surgical drape : protection against AIDS and hepatitis. Gen Dent. 1989 May-Jun;37(3):236-7.
3 Janus CE. The rubber dam reviewed. Compend Contin Educ Dent. 1984; 5:155.
4 Antrim DD. Endodontics and the rubber dam: a review of techniques. J Acad Gen Dent 31:294,1983.
5 Bramwell JD, Hicks ML. Solving isolation problems with rubber base adhesive. J Endod. 1986 Aug; 12(8):363–7.
6 Kelly WH. Radiographic asepsis in endodontic practice. Gen Den. 1989 Jul–Aug;37:302.
7 Sauveur G. Improvement of the rubber dam frame. J of Endodontics. 1997 Dec; 23(12):765-7.
8 Cohn SA. Endodontic radiography : principles and clinical techniques, Gilberts, IL, 1988.

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