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Empreinte et enregistrement pour prothèses complètes amovibles supra-implantaires

Pr Gregory-George Zafiropoulos

Pr Gregory-George Zafiropoulos

mer. 12 mars 2014

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Il est d’usage de proposer une prothèse complète amovible après une extraction des dents ou une pose d’implant dans une arcade totalement édentée, et d’utiliser une prothèse amovible jusqu’à la réalisation de la restauration définitive. Pour bien concevoir une prothèse complète amovible, certains critères doivent être respectés : 1) adéquation de la dimension verticale et du rapport maxillo-mandibulaire ; 2) précision de l’occlusion ; 3) choix approprié des dents quant à la forme, la longueur, la largeur et la position ; 4) degré suffisant du support de la lèvre, et 5) fonction et esthétique qui répondent parfaitement aux attentes des patients. La restauration définitive devrait satisfaire à ces exigences, et même les surpasser. L’obtention d’une empreinte précise et l’évaluation correcte de la relation interocclusale (notamment par la distance interocclusale, le tracé d’un occlusogramme et la détermination de la position exacte des implants posés) sont souvent des tâches compliquées et chronophages.1 Le but du présent article est de décrire une technique de prise d’empreinte et d’enregistrement qui permet de reproduire la relation interocclusale, le tracé de l’occlusogramme et l’aspect esthétique initialement déterminés sur une maquette de prothèse complète qui servira à la fabrication de la prothèse complète amovible supra-implantaire définitive.

Matériel et méthodes
L’extraction de plusieurs dents résiduelles qui ne pouvaient être restaurées, et la pose de six implants aux positions 15, 14, 13, 23, 24 et 25, ont été suivies par la réalisation d’une prothèse complète amovible. Sa fonction et son esthétique ont ensuite été optimisées, après la cicatrisation des lésions dues à l’extraction et la disparition des ulcérations d’origine prothétique. Le cas échéant, l’angulation, la forme et la couleur des dents artificielles, ainsi que la forme de l’appui muqueux de la prothèse, ont aussi été rectifiées (Fig. 1a). La prothèse résultante a été portée par le patient jusqu’à la restauration définitive de son maxillaire, prévue sous forme d’une prothèse amovible supra-implantaire pourvue de couronnes télescopes comme ancrages.

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Les implants ont été désenfouis et la prothèse a été modifiée en vue d’obtenir un espace suffisant pour les piliers de cicatrisation. Une réplique de la prothèse a été fabriquée dans une résine transparente (Paladur, Heraeus, Hanau, Allemagne, Fig. 1b). Elle a fait l’objet d’une essayage et les contraintes occlusales mineures ont été rectifiées (Fig. 1c). Des occlusogrammes ont été élaborés en occlusion centrée, au moyen d’une résine de modelage (Pattern Resin®, GC, Al-sip, Illinois, États- Unis ; Fig. 1c) et des moulages de la prothèse originale. Ensuite, la réplique prothétique a été montée sur un articulateur et l’occlusion a été vérifiée (Fig. 2a) à l’aide des occlusogrammes. Le système de transfert utilisé pour l’empreinte à ciel ouvert, était constitué de tenons en titane et de chapes en plastique (Dentegris, Duisburg, Allemagne, Fig. 2b). La réplique prothétique a été soigneusement modifiée par la création d’ouvertures internes dans la zone des implants, de façon à pouvoir l’utiliser comme porte-empreinte individuel. Ceci permettait également de positionner parfaitement la réplique après la mise en place des tenons pour empreintes. Les empreintes ont été réalisées dans un matériau en polyéther (Impregum, 3M ESPE, St. Paul, Minnesota, États-Unis). Pendant cette procédure, la réplique prothétique a été maintenue en occlusion centrée, au moyen des occlusogrammes (Fig. 3a).

Les tenons en titane pour empreintes ont été raccordés aux répliques d’implants et aux chapes en plastique (Dentegris), qui avaient été noyées et emportées dans le matériau à empreinte (Fig. 3b). Un modèle original a ensuite été fabriqué et monté sur un articulateur au moyen des occlusogrammes (Fig. 3c, Figs. 4a et 4b).

Des piliers prothétiques adaptables (Dentegris) ont servi à fabriquer les piliers implantaires. Le parallélisme, l’angulation, la position et la forme des piliers implantaires ont été déterminés au moyen d’une clé de silicium, fabriquée à partir d’une matrice de silicone-C (Zetalabor, Zhermack SpA, Badia Polesine, Italie, Fig. 5). Le chirurgien-dentiste et le technicien dentaire entrevoyaient deux possibilités pour le choix des piliers prothétiques individualisés : 1) des piliers prothétiques adaptables UCLA (UCLA, Dentegris) pouvant être coulés dans un alliage d’or (par exemple, Portadur P4, Au 68,50 %, Wieland, Pforzheim, Allemagne, Fig. 6a) ou 2) des piliers prothétiques adaptables en platine/iridium (PTIR, Dentegris) pouvant être coulés dans un alliage de chrome/cobalt (CrCo) (par exemple, Ankatit, Anka Guss, Waldaschaff, Allemagne, Fig. 6b).

Après la coulée, les piliers implantaires individualisés ont été meulés, polis et ont servi de base à la fabrication de chapes en or pur électroformées, d’une épaisseur de 0,25 mm (AGC Galvanogold, Au > 99,9 %, Wieland, Fig. 6c).2–4 L’armature a ensuite été élaborée par CFAO. Pour garantir son bon fonctionnement, un montage de simulation en plastique, plus communément appelé mock-up, et une prothèse fixe provisoire(PFP)ont été fraisés(ZENO-PMMA, Wieland). Les piliers implantaires individualisés, les chapes électroformées, le mock-up et la PFP ont été préparés par le laboratoire dentaire pour la phase clinique suivante.

Les piliers prothétiques ont été transférés, positionnés sur les implants puis vissés, en appliquant un couple de serrage de 35 Nm, au moyen d’une clé de repositionnement en résine (Pattern Resin, GC ; Figs. 7a et b). À partir de ce moment, les piliers prothétiques individualisés ont été laissés en place, afin d’éviter toute possibilité d’imprécision. Les chapes électroformées ont été insérées sur les piliers implantaires (Fig. 7c), le mock-up a été placé sur ceux-ci, et l’occlusion a été vérifiée au moyen des occlusogrammes (Figs. 8a et b). Une empreinte définitive des chapes électroformées a été prise avec un matériau en polyéther (Impregum, 3M ESPE). Le mock-up a été replacé et utilisé pour la fabrication d’un nouveau modèle original (définitif). Après la prise de l’empreinte, la PFP a été fixée sur les piliers implantaires, au moyen d’un ciment provisoire (TempBond, Kerr, Orange, Californie, États-Unis). Elle a ensuite été portée jusqu’à la réalisation de la restauration définitive (Fig. 8c).

Le nouveau modèle original a été monté sur articulateur, à l’aide des chapes en or et du mock-up. L’armature métallique a été fraisée (dans ce cas : titane Zenotec TI, Wieland, Fig. 9a). La céramisation de la supra- structure a été réalisée au moyen d’une céramique polymère photopolymérisable pour restauration indirecte (Ceramage, SHOFU, Menlo Park, CA, États-Unis ; Figs. 9a–d). Les chapes en or électroformées ont été fixées à l’armature métallique, par un ciment compomère autodurcissant (AGC Cem, Wieland, Fig. 10).

Les procédures décrites ci-dessus peuvent également être réalisées dans les cas prévoyant une prothèse conjointe (fixe) pour la réhabilitation de l’arcade entière (Figs. 11a et b, Figs. 12a–c), ainsi que dans les cas où certaines dents naturelles sont parodontalement stables et peuvent servir de piliers prothétiques. Dans ces cas, la prothèse complète peut être immédiatement conçue comme prothèse de recouvrement. Une réplique prothétique pourrait être fabriquée sur la base de cette prothèse de recouvrement, et de nouveau utilisée comme décrit précédemment (Figs. 13 a-c).

La porcelaine est un matériau envisageable pour la céramisation des armatures de prothèse conjointe. Si l’angulation des implants ne permet pas la prise d’empreintes selon la technique décrite plus haut et si une prise d’empreinte à ciel ouvert est préférable, les fenestrations peuvent être pratiquées dans la réplique prothétique (Fig. 14).

Discussion
La reconstruction de l’arcade totalement édentée, avec des prothèses amovibles supra-implantaires, nécessite un plan de traitement minutieux et une adaptation passive et précise de la suprastructure. Selon une étude antérieure, une adaptation passive entre la suprastructure implantaire et les piliers sous-jacents, est indispensable pour garantir la durabilité de la prothèse.5 L’obtention de l’adaptation passive nécessite un positionnement précis des répliques d’implants dans le modèle original. La technique de prise d’empreinte et la solidarisation des chapes qui coiffent les implants, sont des facteurs susceptibles de donner lieu à des erreurs de positionnement final des répliques d’implants et par conséquent, de mener à des imprécisions de l’ajustage de la suprastructure définitive.5–10 Par ailleurs, l’angulation ou la proximité des implants peut entraver l’insertion adéquate des chapes et/ou des coiffes de transfert, et peut donc aussi avoir un effet négatif sur l’enregistrement de la position des implants.11

L’enregistrement précis du rapport maxillo-mandibulaire, notamment du rapport interocclusal, est une condition préalable au réglage correct de l’occlusion et à la réussite du traitement.1,10 La prothèse amovible initialement posée permet de corriger le rapport interocclusal, la forme et la couleur des dents et leurs angulations, pendant toute la période de cicatrisation. De cette manière, le patient a le temps de s’accoutumer à la fonction et à l’esthétique de la prothèse amovible. Dans la méthode concernée par cet article, l’empreinte et l’enregistrement précis de la prothèse complète ont été réalisés au moyen d’une réplique servant de porte-empreinte individuel. Il n’a donc pas été utile de répéter toutes les phases habituellement requises pour enregistrer le rapport interocclusal, notamment le recours à un montage en cire (wax-up), etc., au moment de la fabrication de la restauration définitive.

Si une empreinte à ciel ouvert est préférable, la procédure ne nécessite que des modifications mineures. Cette méthode repose sur les données d’une publication antérieure.12 Dans les cas tels que celui-ci, il est conseillé de fabriquer deux répliques prothétiques. L’empreinte peut être prise à l’aide de la première réplique et la seconde est réservée aux étapes suivantes. Il est préférable d’utiliser des piliers prothétiques individualisés plutôt qu’une barre de conjonction. Des chapes galvanisées garantissent l’utilisation de transferts précis, et des télescopes secondaires ainsi que d’autres techniques, servent au transfert des positions implantaires dans la construction de la suprastructure.

L’utilisation de piliers implantaires individualisés améliore les angulations et les formes, augmente l’efficacité de la transmission des forces occlusales de la couronne vers l’implant et l’os, et facilite l’obtention d’un aspect esthétiquement agréable de la prothèse amovible supra- implantaire. La conception du pilier contribue à une meilleure esthétique, en permettant notamment de modifier la position de la couronne ainsi que la dimension et/ou la forme de la base de la restauration.

Les caractéristiques conceptuelles du pilier favorisent en outre la santé et la stabilité dimensionnelle des tissus mous. Les efforts actuels visant à définir objectivement l’esthétique de la restauration implantaire, se portent sur les paramètres muqueux péri-implantaires.13,14 L’apparition du pilier UCLA a offert une solution individualisée aux restaurations implantaires, en apportant, par sa conception de restauration implanto-portée directe, une grande adaptabilité. Les techniques de montage en cire et de coulée, permettent d’adapter la hauteur, le diamètre et l’angulation, de façon à offrir un large éventail de solutions cliniques, aux problèmes liés à une insuffisance de la distance interocclusale, de la distance interproximale, de l’angulation des implants et des réponses associées des tissus mous.15

Les piliers implantaires individualisés ont servi de télescopes primaires, et les chapes électroformées ont fait office de télescopes secondaires, dans les cas où des couronnes télescopes assuraient l’ancrage d’une prothèse amovible. Des chapes en or électroformées offrent de nombreux avantages dans le cadre des restaurations tant amovibles que fixes. Le procédé de galvano-formation et d’électro-formation a permis l’obtention d’une chape secondaire ajustée avec précision au pilier implantaire, avec un espace de 12 à 30 μm seulement. La chape en or électroformée épargne de l’espace et représente un matériau de haute qualité.2–4 L’utilisation de chapes en or pour la prise d’empreinte, assure le transfert exact de la forme, de l’angulation et de la position des piliers implantaires individualisés lors de l’insertion.

Grâce au mock-up fraisé, l’adaptation ultérieure de l’armature issue de la CFAO peut être évaluée, et il est possible d’apporter les modifications nécessaires à la forme de la restauration et à l’occlusion. Il a été plus aisé et moins chronophage de réaliser ces modifications sur le mock-up que sur l’armature métallique elle-même, et il a donc été possible de les transférer directement sur l’armature définitive. Le mock- up est en outre presque « relié » aux chapes en or électroformées pendant l’empreinte, ce qui permet le transfert précis de la position du pilier prothétique. En même temps, la hauteur verticale et le rapport interocclusal ont été enregistrés. La pose d’une restauration provisoire fraisée a permis une mise en charge lente et non progressive des implants, qui mène à un remodelage osseux.16 Les piliers prothétiques ont été laissés en place après le montage. Combinée avec la fabrication d’un nouveau modèle, cette technique réduit davantage le risque d’imprécisions pendant le transfert.

Conclusion
La méthode décrite dans cet article peut être utilisée pour les restaurations de l’arcade complète, tant avec des prothèses amovibles supra-implantaires qu’avec des prothèses fixes implanto-portées. Les empreintes peuvent être prises très précisément et l’occlusion, les dimensions verticales, ainsi que les positions des implants peuvent être transférées, tout en simplifiant le processus de restauration de l’arcade complète. Cette technique a en outre permis une réduction du temps nécessaire au traitement au fauteuil.

Les inconvénients de cette technique sont cependant le besoin d’une qualification du technicien de laboratoire plus élevée qu’à l’ordinaire, pour obtenir un travail de qualité. Le clinicien doit également acquérir certaines compétences complémentaires. Un autre désavantage est la nécessité de disposer d’un laboratoire technique de pointe et les coûts techniques plus importants que ceux des piliers implantaires en titane préfabriqués.

Jusqu’à présent, cette technique n’a pas été utilisée pour la mise en charge immédiate d’implants. Toutefois, les chirurgiens-dentistes et les patients attendent aujourd’hui ce niveau de précision et d’exactitude de la réhabilitation, ainsi qu’une réussite et un aspect esthétique durables.

Note de la rédaction : une liste complète des références est disponible auprès de l’éditeur. Cet article est paru dans CAD/CAM France, numéro 01/2014.

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