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La force des dents : des chercheurs découvrent la structure interne de la dentine

L'illustration montre la biostructure complexe de la dentine. Les tubules dentaires (cylindres creux jaunes, diamètre d'environ 1 µm) sont entourés par des couches de fibres de collagène minéralisées (tiges marron). Les minuscules nanoparticules minérales (invisibles ici) sont insérées dans le maillage des fibres de collagène. (Image : J.B. Forien, Julius Wolff Institute)

mar. 30 juin 2015

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BERLIN, Allemagne : Soumises à d’importantes contraintes physiques, les dents humaines se composent d’un matériau organique des plus résistants. Jusqu’à présent la haute résistance de la dentine à la cassure n'avait pas été clairement explicitée. Une équipe interdisciplinaire de scientifiques a analysé la structure complexe de la dentine, révélant que ses nanoparticules minérales sont précompressés, que ce stress interne permet de lutter contre la propagation d'une fissure, et augmente ainsi la résistance de la biostructure. Cette découverte pourrait créer de nouvelles possibilités pour les matériaux de restauration en dentisterie.

L’ingénierie utilise des contraintes internes pour renforcer des matériaux à des fins techniques spécifiques. Or, il semble que l'évolution connaisse depuis longtemps cette particularité et l’a mise à profit dans nos dents. Contrairement aux os, qui sont composées en partie de cellules vivantes, les dents humaines ne sont pas en mesure de se ressouder naturellement. Leur masse est composée de dentine, un matériau ressemblant à l'os mais qui s’agence en un réseau de nanoparticules minérales prises dans des fibres de protéine de collagène, auxquelles elles sont étroitement liées. Ces fibres présentes dans toutes les dents jouent un rôle dans la solidité et la résistance au stress des dents. Toutefois, la manière dont ce complexe mineralo/protéique interagissait pour limiter la propagation d’une fissure était inconnue jusqu'à présent.

Des chercheurs de l'institut de Wolff Julius à la faculté de médecine de la Charité à Berlin, ainsi que plusieurs partenaires nationaux et internationaux, ont examiné plus étroitement ces biostructures. Ils ont effectué par microfaisceaux in situ, des expériences de stress par rayonnement, grâce à l’utilisation du synchrotron BESSY II du Helmholtz-Zentrum de Berlin, et ont analysé l'orientation locale des nanoparticules minérales, à l'aide de la plateforme de nano-imagerie de l'European Synchrotron Radiation Facility de Grenoble.

D’après l'équipe de recherche, en réponse à un stress mimant les contraintes physiques auxquelles les dents sont soumises, les particules minérales sont de plus en plus comprimées et résistantes. « Notre groupe a été en mesure d'utiliser les changements d'humidité, pour démontrer comment le stress apparaît dans le minéral et dans les fibres de collagène, » a expliqué le Dr Paul Zaslansky de l'institut de Julius Wolff. Ces expériences de modulation d’humidité de la dent ont permis de démontrer que ce sont bien les fibres de collagène qui rétrécissent en premier, entrainant une compaction des nanoparticules de dentine qui y sont étroitement liées. « Nous avons découvert que cette compression qui contribue à prévenir l'apparition de fissures, a lieu de telle manière que les fissures ne peuvent atteindre facilement les parties intérieures de la dent et préserve ainsi la pulpe sensible. »

Les chercheurs ont également examiné le lien étroit des minéraux et des protéines en cas de destruction par la chaleur. Une fois les protéines de collagène dénaturées par ce biais, la résistance de la dentine devient alors beaucoup plus faible et la dent plus friable. « Nous pensons donc que l'équilibre des tensions entre les particules et la protéine est important pour la survie prolongée des dents dans la bouche, » a déclaré Jean-Baptiste Forien, chercheur à la Charité.

Les résultats de cette étude pourraient expliquer pourquoi des dents artificielles ne fonctionnent généralement pas comme des dents saines : elles sont simplement trop passives et les mécanismes d’adaptation aux contraintes présents dans les structures de la dent naturelle leur manquent pour pouvoir leur ressembler pleinement. Par conséquent, les obturations ne répondent pas de la même manière que les dents naturelles et leur résistance dans le temps est plus limitée. « Nos résultats pourraient inspirer le développement de nouvelles structures en céramique pour le remplacement ou la réparation des dents » espère Zaslansky.

L'étude, intitulée « Compressive residual strains in mineral nanoparticles as a possible origin of enhanced crack resistance in human tooth dentin », a été publiée dans le journal de Nano Letters le 26 mai 2015.

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