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Ergonomie du poste de travail du chirurgien-dentiste - Leçon 1

Dr David Blanc

Dr David Blanc

mar. 17 septembre 2013

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Une définition simple de l’ergonomie est qu’elle consiste à adapter le travail, les outils et l’environnement à l’homme (et non l’inverse). Ce qui est ergonomique est donc ce qui est adapté. Cette inadaptation se traduit soit par une diminution du confort de travail, et de la santé via des troubles musculo-squelettiques (TMS), de la sécurité, soit par un problème de production en qualité ou en quantité.

En ergonomie sont dissociées : la CONTRAINTE, qui est ce qui s’applique au chirurgien-dentiste, et l’ASTREINTE, qui est la réaction physiologique à la contrainte. Ces contraintes sont entre autre, la distance œil tâche, l’orientation de la cavité buccale du patient, la position du patient, la hauteur de l’assise du praticien et de la cavité buccale du patient, l’espace de préhension. Ces éléments seront détaillés dans les différents numéros de Dental Tribune et en ligne sur le site de Dental Tribune.

La distance œil tâche :

Il s’agit de la distance entre l’œil du praticien et la cavité buccale du patient lors de l’activité professionnelle. C’est cette distance qui va conditionner la position du praticien. Suivant la définition de l’ergonomie, il s’agira évidemment d’adapter la position du patient au praticien et non l’inverse, afin de répondre à cette contrainte de distance. Cette distance doit répondre à des impératifs de précision, d’acuité visuelle, d’accommodation, de fatigue de convergence des yeux. La distance la plus faible à laquelle on peut voir un point net s’appelle la distance minimale de vision distincte ou punctum proximum (Pp) (Fig. 1). Elle augmente avec l’âge, mais est voisine de 25 cm à 40 ans pour un œil emmétrope ou corrigé [1], permettant une vision sans fatigue excessive [2].

L’acuité visuelle est la grandeur qui permet de mesurer la capacité de l’œil humain de discriminer 2 points distincts, ceci en fonction de la distance qui sépare les deux points et la distance entre le globe oculaire et ces 2 points, c’est-à-dire l’éloignement de l’observateur. Ce phénomène porte le nom de discrimination visuelle. Elle diminue avec l’augmentation de la distance œil-tâche, et dépend de l’éclairement qui est inversement proportionnel au carré de la distance [3]. Une autre notion est le pouvoir séparateur angulaire de l’œil, il est de l’ordre de la minute d’angle, soit 3.10-4 rad. A 25 cm, le pouvoir séparateur linéique est alors de 0,1 mm [4]. Il est donc important d’adapter la hauteur du patient, afin de conserver une distance de travail de 25 cm. L’objectif est d’éviter de se pencher inévitablement en avant pour voir les détails (Fig. 2).
 

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Une fois la hauteur du siège opérateur réglée, la cavité buccale du patient doit être montée jusqu’à ce que la distance œil tache soit de 25 cm (Fig. 2 bis). Une alternative à cela est l’utilisation d’aides optiques de type loupes, associées à un éclairage, ce qui permet de travailler avec une distance de travail plus élevée sans perdre en précision. L’inconvénient est qu’une distance de travail élevée a un impact sur la flexion cervicale du praticien. Afin de voir la bouche du patient, le praticien doit orienter son regard vers le bas. Plusieurs stratégies s’offrent à lui : soit fléchir les cervicales, soit fléchir le rachis dorso-lombaire, soit fléchir les articulations coxo fémorales, soit orienter les yeux vers le bas. Il se produit en général une combinaison de toutes ces stratégies, mais la flexion des cervicales et la rotation des globes oculaires sont plus sollicitées que l’inclinaison du tronc [5].

Les changements de positions du corps servent à compléter la position des yeux pour améliorer la vision de la tâche. Le praticien peut décider de compenser avec l’orientation des globes oculaires, mais cela demande un effort musculaire inconfortable pour les orienter vers le bas. En effet, en 1983 la Eastman Kodak Company, Human Factor Section [6] estime que l’angle préféré de rotation des yeux vers le bas pour le travail assis était de 40°. Une fatigue musculaire posturale et une diminution du temps de vision continue apparaît lorsque cet angle atteint 45° ou plus. Des études de Kroemer et Hill [7] [8] montrent elles que l’angle préféré de vision vers le bas est de 29° par rapport à l’horizontale lorsque le dos et la tête sont droits. Ce sont donc les cervicales, via une flexion accrue, qui vont compenser le besoin d’orienter le regard vers le bas.

Plus le patient est bas, plus le praticien va devoir solliciter ses yeux et ses cervicales, et donc atteindre des valeurs importantes. Plus le patient est haut, en respectant la distance minimale de vision distincte, plus le praticien va relever la tête, et donc moins il aura besoin de faire de la flexion du rachis et de baisser les yeux (Fig. 3).

Le microscope a l’avantage de s’affranchir de la distance de travail, et surtout son angulation permet de réduire la flexion du rachis, et permet de conserver une position des yeux confortable (Fig. 4). Cette distance de travail de 25 cm a des conséquences sur la position du praticien et du patient, pour laquelle il existe des adaptations. Cela sera détaillé dans les prochains articles.

Note de la rédaction : une liste complète des références est disponible auprès de l’éditeur.

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