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La crise du coronavirus vue par les dentistes dans le monde : Dr Luc Manhès, France

Le Dr Luc Manhès, exerce à St Jean de Védas, dans son cabinet spécialisé en paro-implantologie (Photo : Dr Luc Manhès)
Nathalie Schüller, DTI

Nathalie Schüller, DTI

jeu. 9 avril 2020

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Après avoir obtenu son diplôme de chirurgien-dentiste de la faculté de Montpellier, le Dr Luc Manhès s'est formé en micro-chirurgie, en implantologie et en anatomie cranio/cervico-faciale. Il est formateur en chirurgie guidée, co-fondateur de MadeInGuide, formateur en chirurgie guidée, implantologie et référent Dentsply Sirona en imaginerie 3D. Il exerce à St Jean de Védas, dans son cabinet spécialisé en paro-implantologie.

Dr Manhès, quelle est la situation dans votre pays face à la crise du coronavirus, quelles mesures ont été prises et depuis quand?
En France, le confinement a été mis en place pour lutter contre le virus depuis le mardi 17 mars. Comme pour tous les pays cette crise a permis de montrer malheureusement, le manque d’anticipation du gouvernement, avec des pénuries inacceptables en masques et autres, pour le personnel soignant ainsi que les autres citoyens dont l’activité est indispensable (caissières, livreurs, routiers, force de l’ordre, etc.). Rapidement les hôpitaux ont été saturés devant l’afflux de patients nécessitant une prise en charge respiratoire, en démarrant de l’est de la France, puis la région parisienne. Là aussi, l’incompréhension est de voir à quel point les enjeux politiques passent au- dessus du bon sens et de la santé, avec des annonces médiatiques relatant la débauche d’énergie pour transférer des patients graves sous respirateur, à des centaines de kilomètres par train, hélicoptère ou encore bateau de l’armée, alors qu’il y a des cliniques vides à proximité ayant mis tout en œuvre pour accueillir ces patients ! C’est juste honteux, mais peu relayé par la presse souvent elle aussi corrompue.

Comment avez-vous été affecté par les mesures éventuelles de confinement, professionnellement et personnellement? Votre cabinet est-il toujours ouvert et si fermé, depuis quand?
Depuis le 17 mars l’ordre national des dentistes nous a interdit d’exercer, en dehors d’une prise en charge téléphonique des urgences pour nos patients. Ainsi nous sommes confinés à demeure depuis le premier jour, avec mon épouse et mes deux enfants. Le cabinet est fermé, ma collaboratrice est aussi arrêtée et mes trois assistantes sont au chômage partiel.

Si votre cabinet est encore ouvert, ou fermé mais vous voyez encore les patients en situation d’urgence, avez-vous changé la façon de traiter vos patients ?
Alors que le cabinet est fermé depuis plus de 15 jours, j’ai reçu à deux reprises des patients pour des urgences. L’un pour retoucher une prothèse provisoire amovible qui le blessait et l’autre pour revisser une prothèse provisoire en mci. Dans les deux cas, j’ai suivi les consignes m’interdisant d’utiliser des instruments rotatifs en bouche, et j’ai renforcé nos procédures habituelles de désinfection et de protection.

Comment vivez-vous cette crise et utilisez-vous votre temps lié à votre travail, à vos patients, et si vous souhaitez partager, votre vie personnelle, et les choses que vous aimez et que vous avez généralement, peu de temps de faire peut-être ?
Pour ce qui est de mes occupations pendant ce confinement, j’avoue que les premiers jours ont été très productifs, avec la réalisation de toutes les tâches de jardinage et de bricolage qui étaient en attente depuis bien longtemps. Même chose pour des séances quotidiennes de gym et bien sûr côté professionnel, le classement des photos et vidéos ainsi que la volonté de reprendre nos supports de formation pour les faire évoluer, ainsi que certaines conférences. Mais la lassitude de ce confinement et peut-être le manque de perspectives des évolutions ont eu raison de cette motivation.

Savez-vous comment les mesures de confinement ont affecté le marché dentaire national?
En ce qui concerne le marché dentaire, il est difficile de dire à quel point il sera impacté. Mais il est évident que l’absence de ventes durant cette longue période sera difficilement rattrapée, surtout dans un contexte économique de récession et de remise en question des professionnels.

Ne sachant pas combien de temps il faudra pour que cette crise se termine, pensez-vous, qu'elle soit de courte ou de longue durée, qu'elle va changer votre entreprise, la profession?
Là aussi je suis parfois pessimiste en pensant que nous allons devoir patienter plus de un mois et demi, mais mon côté optimiste l’emporte et espère que le dépistage associé aux traitements, ainsi que les tests sérologiques nous permettront de reprendre notre activité plus tôt.

Avec toute la bonne volonté du monde il sera difficile de compenser un à deux mois d’inactivité, sans compter la récession et sûrement certaines craintes de patients, à l’égard des environnements médicaux. Certains de nos confrères ayant de petites structures auront peut-être beaucoup de mal à refaire surface. Pour notre part, nous allons prévoir de reprendre une activité avec des plages horaires plus importantes les premiers mois pour refaire notre trésorerie, avec plus de jours ouvrés et moins de vacances. En associant des protocoles de désinfection et de prise en charge des patients renforcés.

On pourrait espérer que face à une telle crise, c’est l’occasion de refléter sur nos priorités, et peut-être de changer vers le mieux, la façon dont nous vivons notre vie. Qu'en pensez-vous? Quels changements aimeriez-vous voir se produire?
Effectivement, cette crise nous a tous beaucoup affecté et surprise.  Elle nous a permis de prendre du temps, du temps pour réfléchir. De cette réflexion il faudra peut-être changer des habitudes de consommation, de protections sanitaires, de comportement avec les gens et l’environnement. Chaque remise en question nous pousse souvent à envisager l’avenir dans ses priorités et pour l’améliorer en faisant mieux qu’avant.
Professionnellement, nous avons toujours œuvré pour proposer une dentisterie de qualité avec un plateau technique le plus moderne possible, ce qui ne changera pas, mais j’espère que cette crise permettra aux politiques qui depuis quelques années entravent notre profession, par des lois visant à diminuer la qualité des soins, par des contraintes de plafonnement tarifaires, tirant la profession vers le bas, d'avoir plus d'éléments lorsqu'ils prennent des décisions relatives à notre profession.

Je finirais par une note positive, en rappelant que nous avons une profession passionnante, où les nouvelles technologies permettent de proposer une prise en charge optimale et moderne, qui nous permettra de retrouver rapidement un épanouissement adapté à nos nouvelles priorités.

Prenez bien soins de vous et vos proches.

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