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Photographie endobuccale d’ISP maxillaire ( Toutes les images : Drs Harmik Minassian et Virgile Metrop)
Drs Harmik Minassian et Virgile Metrop

Drs Harmik Minassian et Virgile Metrop

mar. 25 novembre 2025

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PARIS, France : En vue du congrès de l’ADF 2025 qui débute aujourd’hui, nous vous proposons un aperçu de l’article des docteurs Virgile Metrop et Minassian, responsable scientifique de la conférence l’Essentiel – D93, qui se tiendra ce vendredi, 28 novembre de 16h à 17h au Palais des Congrès de Paris.

1- Contexte, enjeux et périmètre

Les atrophies osseuses severes, réduisant volume et qualite osseuse, rendent aleatoire la mise en place et la perennite des implants endo‑osseux conventionnels. Elles sont d’autant plus marquees sur les secteurs posterieurs maxillaires (os de type 4 selon Lekholm et Zarb), ou la resorption osseuse est plus rapide qu’a la mandibule.1 Les alternatives par greffes (sinus lift, regenerations osseuses guidees, Lefort-1-greffe) exposent a une morbidite non negligeable et allongent considerablement les delais de traitement. Le recours aux implants zygomatiques (IZ) ou aux implants sous-periostes (ISP) presente en ce sens un interet d’option sans greffe afin de simplifier la prise en charge.2 Cette synthese vise a comparer les indications, techniques, resultats cliniques, complications, aspects biomecaniques et experience patient.

2- Principes anatomiqueset biomécaniques

Implants zygomatiques

Les IZ ont ete decrits cliniquement des 1988 par Branemark, d’abord pour soutenir des obturateurs apres maxillectomie, puis ont été appliques pour des restaurations d’arcades completes avec techniques de mise en charge immediate. Ils traversent plusieurs corticales entre le massif maxillaire et l’os zygomatique, ce qui explique la stabilite malgre la densité zygomatique variable.1 Les schemas classiques retrouvent : une configuration hybride avec deux IZ en posterieur et des implants conventionnels anterieurs; ou une configuration en ≪ quad ≫ avec 4 IZ lorsque l’os anterieur est insuffisant.2, 3 L’emergence prothetique doit etre anticipee, avec la realisation de gouttieres osseuses ou ≪ sinus‑slot ≫, selon la position intra/extra-maxillaire de l’IZ, visant a limiter l’encombrement palatin, l’empreinte sinusienne et les complications eventuelles.1, 4 Sur le plan biomecanique, les analyses par éléments finis indiquent une repartition efficace des contraintes le long des piliers osseux, similaire a celle observee dans un maxillaire dente, avec une focalisation des contraintes aux apex des implants dans la region zygomatique.5, 6 Elles suggerent que le support osseux zygomatique ne doit pas etre inferieur a 15 mm,7 et soulignent que la repartition des charges depend fortement de la rigidite de la suprastructure prothetique. La conception prothetique doit ainsi tenir compte de la distribution des contraintes et guider un design biomecaniquement optimise (embrasures, epaisseurs, materiaux, cantilever).8 Implants sous‑periostes (ISP) de nouvelle génération Les ISP ont ete introduits au debut des annees 1940, et ont ete progressivement abandonnes en raison de nombreuses limitations techniques, notamment des taux eleves d’infection, des difficultes liees a la mise en place des implants et a l’obtention d’empreintes osseuses suffisamment etendues. Les ISP modernes connaissent un nouvel essor grace a leur conception sur CBCT avec modélisation 3D (planification virtuelle), ajoute aux techniques d’impression en titane (Ti6Al4V) ou matériaux alternatifs (Cfr‑PEEK). Ils sont fixes a l’aide de vis d’osteosynthese aux piliers de resistance : nasal, zygomatico‑maxillaire, et palatin.9, 10 La geometrie sur-mesure ameliore l’adaptation a la surface osseuse, raccourcit les temps operatoires et autorise souvent une mise en charge immediate.9 L’armature reste extra‑osseuse (sous‑periostee) avec des piliers transmuqueux. Un traitement de la surface implantaire est souvent retrouve selon l’anatomie de l’ISP conferant : une surface rugueuse cote osseux pour favoriser un processus d’osteo-adaptation, une surface lisse polie en zone transmuqueuse pour optimiser l’integration des tissus mous.11

Fig. 1a : Photographie endobuccale de deux IZ.

Fig. 1a : Photographie endobuccale de deux IZ.

Fig. 1b : Configuration en « quad-zygo » sur CBCT.

Fig. 1b : Configuration en « quad-zygo » sur CBCT.

3- Indications et contre-indications

Indications partagées

Les indications des IZ ou des ISP se retrouvent souvent dans des situations de deficit osseux important 3, 11, 12 :

  • Atrophie maxillaire severe a extreme (classe V ou VI de Cawood et Howell) rendant non viables les implants conventionnels.
  • Echecs anterieurs d’implants ou greffes, necessitant une strategie de rattrapage ≪ sans greffe ≫.
  • Deficits maxillaires post‑resection oncologique, traumatiques ou congenitaux (tels que les fentes alveolo-palatines).

Quand privilégier les IZ

Les IZ sont favorises lorsque le volume osseux anterieur est suffisant pour permettre une configuration hybride, avec une pneumatisation sinusienne importante des secteurs posterieurs. 3 L’absence d’obstruction ostio-meatale et le controle des comorbidites (intervention plus lourde) sont egalement a verifier pour que le patient soit apte a une chirurgie zygomatico‑sinusienne.

Quand privilégier les ISP

Les ISP seront plus facilement indiques chez les patients ages, avec polymorbidites, pour lesquels un parcours court en un temps operatoire (etapes prothetiques incluses) est preferable. En effet les protocoles chirurgicaux permettent la mise en place d’une prothese immediate directement apres la pose des ISP, contrairement aux IZ qui necessitent des temps prothetiques postoperatoires avec empreintes.13

Les ISP sont adaptes aux situations d’echecs anterieurs avec contexte de reconstruction ou une adaptation geometrique fine et des reinterventions ciblees sont utiles. Ils seront egalement consideres lorsque les IZ sont contre-indiques : sinus pathologiques, anatomie zygomatique defavorable, ou exposition aux risques orbitaires. Enfin les ISP se positionnent comme seule alternative pour les situations d’atrophies severes a la mandibule.

4- Techniques chirurgicales et points d’attention

IZ : de la « technique originelle » à l’approche « anatomy guided »

Initialement, la ≪ technique chirurgicale originelle ≫ (OST) faisait appel a une fenetre laterale, avec un trajet intra-sinusien et une emergence souvent palatine. L’approche ≪ anatomy guided ≫ (AGA/ZAGA) est desormais consideree avec des trajectoires protetiquement guidees (sinus‑slot, et position extra-maxillaire) visant des emergences implantaires plus crestales et une reduction du surplomb palatin. L’AGA est, dans les series comparatives, associee a moins de sinusites, paresthesies et fistules.4

Tableau récapitulatif des enjeux entre IZ et ISP.

Tableau récapitulatif des enjeux entre IZ et ISP.

ISP : flux numérique et CFAO

La conception des ISP est faite sur-mesure, au travers d’une planification chirurgicale virtuelle sur CBCT haute resolution et d’analyses par elements finis.10, 14 Le design des plaques d’osteosynthese, des bras, et des emergences est realise en tenant compte des piliers osseux maxillaires, avec optimisation topologique pour une meilleure transmission des contraintes masticatoires. Le materiau principalement utilise est le titane grade 5 (Ti6Al4V) pour ses caractéristiques biomecaniques et biocompatibles, avec une fabrication additive par frittage laser sur lit de poudre (DMLS/LPBF).15 Le PEEK renforce en fibres de carbone (Cfr-PEEK) est également retrouve comme alternative, afin de reduire la rigidite et les contraintes sur les corticales.16, 17 En pratique, la majorite des ISP sont actuellement en titane en raison de son large recul clinique. La fixation des ISP est assuree par des vis d’osteosynthese. Une analyse consciencieuse de leur nombre et positionnement ainsi que l’obtention d’un couple de serrage optimal sont primordiales pour garantir une stabilite et une bonne integration a long terme.9 L’utilisation d’un design numerique personnalise permet de localiser les vis dans des zones osseuses optimales (notamment le pilier zygomatique) preservant une resistance mecanique meme en cas de perte partielle de fixation.13, 18 La réflexion sur le design monobloc ou en deux structures independantes est egalement importante pour trouver le meilleur compromis entre répartition locale du stress sur les corticales et distribution des contraintes internes aux ISP. Une conception en deux structures offrirait les meilleurs resultats, garantissant une meilleure stabilite structurelle.9, 13 Cependant la taille et l’emplacement des vis influencent davantage les contraintes osseuses que le design implantaire lui-meme. Une fois l’ancrage osseux des ISP obtenu, les vis jouent un role moindre dans la repartition des contraintes osseuses. La geometrie initiale de l’implant et sa precision d’ajustement a la surface osseuse sont donc essentielles a la survie des ISP.14 Enfin, l’epaisseur des ISP est réfléchie pour constituer le compromis ideal entre resistance mecanique et minimisation des risques de dehiscence muqueuse autour des piliers. Les analyses suggerent qu’avec les techniques modernes d’impression et l’optimisation topologique, l’epaisseur optimale est des 1,5 mm. Elle permet de reduire la masse de l’implant de 27,7 %, et de diminuer la surface de contact pour faciliter l’integration et la pose.13, 18

Fig. 2a : Photographie endobuccale d’ISP maxillaire.

Fig. 2a : Photographie endobuccale d’ISP maxillaire.

Fig. 2b : Courtoisie du Dr P Mestrallet. Orthopantomogramme postopératoire.

Fig. 2b : Courtoisie du Dr P Mestrallet. Orthopantomogramme postopératoire.

5- Résultats cliniques : survie, succès et cinétique des échecs

Implants zygomatiques

Les dernieres meta-analyses retrouvent un taux de survie des IZ autour de 96 %.2, 3, 12 Le taux d’echec augmente considérablement dans les cas de resections larges avec maxillectomies, jusqu’a 21 %.2 La mise en charge immediate montre des taux de survie légèrement supérieurs a la mise en charge differee, et les echecs surviennent davantage la premiere annee, avec une cinetique autour de 2 % dans les douze premiers mois suivis de 0,5 % par an.3

Implants sous‑periostes

Les resultats cliniques recents présentent des taux de survie similaires pour les ISP, entre 95 % et 97 %,15, 19, 20 comparables aux implants conventionnels. Le peu d’echecs rapportes est a nuancer avec l’absence de donnees randomisees et le recul global encore modeste, restant une des principales limites des ISP actuellement.

Note éditoriale:

Cet article a été initialement publié dans today ADF Paris Nov. 25–29, 2025. Une liste complète des références est disponible ici.

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