DT News - France - Deficit de visibilité internationale des thèses dentaires françaises

Search Dental Tribune

Deficit de visibilité internationale des thèses dentaires françaises

la connaissance contenue dans les thèses dentaires françaises manque de visibilité au niveau international (Photo : Helder Almeida)

dim. 10 mars 2013

Enregistrer

BORDEAUX, France : Une étude a mesuré l´impact des thèses dentaires françaises sur la connaissance scientifique en se basant sur les publications correspondantes recensées par le moteur de recherche scientifique Pubmed et les résumés de rencontres publiés dans le Journal of Dental Research. Sur une période de 3 ans (2009-2011), sur les 634 thèses des 16 facultés d'odontologie françaises défendues en 2010, un seul article et six résumés ont été recensé dans un journal à comité de lecture.

Depuis 1976, date de création du diplôme doctorat de chirurgie dentaire, tous les étudiants en France doivent à la fin leurs 6 années d´études, défendre une thèse devant un jury composé de membres du corps enseignant afin d'être autorisé à travailler dans un cabinet privé. La valeur scientifique de ce travail est reconnue de manière locale et sa diffusion au sein de la communauté scientifique internationale joue un rôle majeur pour la reconnaissance du travail de l´étudiant, de son superviseur et de la visibilité de l'institution d´accueil. Les publications constituent le principal moyen de diffusion des connaissances scientifiques et sont donc de première importance – étant sous la forme d'articles revus par des pairs ou de résumés des exposés présentés lors de rencontres internationales.

L'objectif de cette étude a été de mesurer la diffusion internationale des connaissances produites par les thèses de master dentaires français. Pour estimer ce taux de diffusion, le Dr Gillet de la Faculté d´Odontologie de Bordeaux a recensé les articles publiés dans des revues indexées sur le moteur de recherche Pubmed et les résumés de 4 rencontres de l´IARD publiés dans le Journal of Dental Research.

Sur la période donnée (2009-2011), les résultats montrent le nombre de thèses de master dentaires publiés par la faculté, le taux de participation de toutes les facultés françaises par rencontre, le nombre de rencontres auxquelles la faculté a participé et le nombre d'étudiants de chaque faculté ayant donné une présentation lors de ces rencontres.

Ainsi, les auteurs ont trouvé une seule publication internationale en anglais dans laquelle l'étudiant est désigné comme 4e auteur, tandis que son supérieur est dernier auteur-correspondant.

En parallèle, l´étude relate un taux de participation aux Rencontres Internationales de Dentisterie, de San Diego à 37,5 %, de Munich à 50 %, de Miami et Budapest à 62,5 % et de Barcelone à 81,3 %. Parmi les 16 facultés dentaires françaises, deux n’ont jamais participé à un seul de ces meetings internationaux.

Lors de ces rencontres, seulement 6 présentations liées à un travail de thèse dentaire française ont été données, issues de seulement trois facultés distinctes, ce qui implique que 13 facultés dentaires françaises n’ont jamais présenté un seul travail lié à une thèse de Master dentaire sur la période.
Au total sur la période seulement quatre étudiants ont ainsi pu bénéficier d’une visibilité internationale de leur travail de thèse. Sur 634 élèves, cela équivaut à un taux de seulement 0,6 %.
Ce très faible taux aurait pu être lié à la durée sur laquelle porte l’étude; en répétant l’étude sur une période de 6 ans (2005 – 2010), en utilisant exactement la même méthode les auteurs ont trouvé un taux global de 0,8 % proche de celui obtenu sur trois ans seulement. La courte période n’explique donc pas cette spécificité française.

Alors que la participation aux rencontres Internationales de dentisterie est forte, la diffusion internationale des connaissances produites par les thèses de master dentaires français est incroyablement faible. Un seul ouvrage a été publié dans une revue internationale dans un journal n'ayant même pas de facteur d'impact. Or la publication scientifique est le principal, sinon le seul critère pris en compte lors de l’évaluation de l'activité de recherche tant au niveau des institutions que des chercheurs individuels [indice de Hirsch ] [Times Higher Education World University Ranking et Shanghai Academic Ranking of World Universities]. Le nombre de publications et les facteurs d'impact correspondants sont largement utilisés pour l'évaluation de la qualité de la recherche et malgré les critiques, ces classements permettent d’attirer étudiants, nouveaux enseignants et financements.

Ce travail est la première étude consacrée à la diffusion des thèses de master dentaires en France. Comparativement à une étude similaire réalisée en Finlande, il y a 10 ans, les travaux de Gillet et collaborateurs montrent un taux beaucoup plus faible pour la France (0,6 % contre 8,2). De plus dans une vue d'ensemble de la bibliographie, la proportion des thèses médicales menant à une diffusion internationale varie de 6 % à 41 % selon les pays soit un taux10 à 70 fois supérieur.
Gillet et collaborateurs s’interrogent donc à juste titre sur les causes pouvant expliquer cette absence virtuelle de publication et de visibilité et identifient plusieurs facteurs.

Tout d´abord, écrire un article pour une revue à comité de lecture est une tâche très exigeante pour laquelle les étudiants ne sont pas préparés, ni correctement formés. Cela nécessite également du temps et un investissement spécifique de la part du formateur.

Ensuite, l´objectif principal des élèves est d´obtenir un diplôme pour travailler dans un cabinet privé, pas nécessairement de publier. Pourtant le travail de thèse est souvent la seule occasion pour un dentiste de participer à la production et à la diffusion de nouvelles connaissances scientifiques. Pour cela, le directeur de thèse doit jouer un rôle essentiel afin d’inciter l'élève à s'engager dans ce travail. Il doit autant que possible participer à la rédaction d'articles scientifiques aux côtés de son élève. Or pour ce faire, il doit lui-même être convaincu de l’importance de la diffusion des connaissances, être disposé et capable d’y consacrer le temps nécessaire.

Les auteurs insistent sur le fait qu’une publication dans une revue savante est la plus à même d’établir la qualité d'un travail. La présentation lors de rencontres scientifiques constitue elle un moyen plus rapide de partage et de diffusion des données scientifiques nouvelles. En conséquence, ils suggèrent d'offrir aux élèves un cours spécifique portant sur l’écriture de résumés et la présentation de posters respectant les critères scientifiques des rencontres internationales. Cela permettrait de sensibiliser les futurs dentistes à l'importance de la diffusion internationale de leurs éventuels travaux de recherche futurs.

L´étude intitulée “Measuring the international spreading of the knowledge produced by French dental master theses” a été publiée en février 2013 dans la revue European Journal of Dental Education et disponible intégralement en ligne.

To post a reply please login or register
advertisement
advertisement