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Utilisation clinique du laser Er,Cr:YSGG dans le traitement endodontique

Comparaison des différentes longueurs d’onde utilisées par les lasers et de leurs profondeurs de pénétration dans l’eau / tissu. Plus grande est l’absorption, plus grande est la capacité du laser à couper ou exciser des tissus.
Dr Justin Kolnick

Dr Justin Kolnick

mar. 17 décembre 2013

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L’élimination totale des bactéries des systèmes radiculaires infectés, reste le principal objectif du traitement endodontique. Toutefois, en dépit d’une pléthore de nouveaux produits et techniques, atteindre cet objectif reste toujours très difficile. Historiquement, les traitements endodontiques mettaient l’accent sur la désinfection du canal radiculaire, avec « mise au tombeau » des bactéries résiduelles dans les tubuli dentinaires et les zones inaccessibles du système canalaire. Bien que de nombreux facteurs aient été impliqués dans l’étiologie de l’échec endodontique, il est devenu évident que ces bactéries « ensevelies » jouent un rôle clé dans la persistance de la maladie endodontique (Siqueira & Rocas 2008).

Bien que des résultats impressionnants aient été obtenu in vitro, l’énergie laser seule n’a pas été en mesure de tuer la totalité des bactéries dans les dents extraites. Dans une perspective clinique, il est évident que la combinaison des différentes modalités de traitement, est nécessaire pour stériliser les systèmes canalaires. En outre, beaucoup d’obstacles cliniques existent, ce qui complique encore la capacité du clinicien à atteindre cet objectif. Parmi ces obstacles, entre autres : l’accès endodontique restreint, l’anatomie complexe du canal radiculaire, les limites de l’irrigation et des techniques d’instrumentation, l’incapacité d’enterrer les bactéries et l’incapacité à atteindre et éliminer les bactéries profondes au sein de la structure de la dent. Bien que le but de cet article soit de se concentrer sur l’utilisation clinique du laser Er,Cr:YSGG à embouts pour tir radial, un protocole définitif de traitement doit être en place, pour réduire la charge bactérienne intracanalaire avant l’utilisation du laser et aussi pour faciliter l’application de l’énergie laser à la partie essentielle du canal radiculaire, le tiers apical.

Le laser erbium, chrome : yttrium-scandium-gallium-grenat (Er,Cr:YSGG) émet une longueur d’onde de 2 780 nm qui est fortement absorbée par l’eau. Plus basse est la profondeur de pénétration dans l’eau ou élevée l’absorption), plus grande est les tissus (ou plus la capacité du laser à couper ou à enlever des tissus (Fig.1). Puisque cette longueur d’onde est très similaire à celle correspondant à l’absorption maximale dans l’eau et l’hydroxyapatite, la photo-ablation se produit lorsque l’eau s’évapore instantanément, ce qui provoque l’ablation des tissus. Gordon et al. (2007) ont constaté qu’il était possible de réaliser l’expansion et l’effondrement de l’eau intratubulaire aussi profondément que 1 000 μm ou plus. Cette micro impulsion, induite par l’absorption, a été capable de produire des ondes acoustiques assez fortes pour perturber et tuer les bactéries intratubulaires. Ces résultats sont significatifs puisque les bactéries ont été identifiées à des profondeurs de 1 000 μm (Kouchi et al. 1980), et à des profondeurs de 800 μm pour E. faecalis (Haapasalo et Orstavik, 1987). Des irrigants tels que l’hypochlorite de sodium ont un effet limité sur ces bactéries avec une profondeur de pénétration de seulement 100 μm (Berrutti et al. 1997). On a récemment trouvé qu’une augmentation de la concentration, du temps d’exposition et de la température améliorait la pénétration du NaOCl (Zou et al. 2010). Des taux de destruction bactérienne prometteurs, en utilisant les lasers Er,Cr:YSGG avec embouts à tir radial, ont été signalés sur des dents extraites. Une réduction de l’infection de 99,7 % a été obtenue pour E. faecalis à des profondeurs de 200 μm dans la dentine (Gordon et al. 2007) et de 94,1 % à des profondeurs de 1000 μm (Schoop et al. 2007).

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Le développement de la pointe laser pour tir radial (Biolase Technology) avec une forme de pointe qui émet l’énergie du laser en un cône large, permet de mieux couvrir les parois du canal radiculaire que les embouts tirant par leur extrémité (Fig. 2). Cela facilite l’entrée de l’énergie laser émise dans les tubuli dentinaires, pour atteindre les bactéries qui ont pénétré profondément dans la dentine.

_Protocole de traitement

Les techniques actuelles intégrant la main et/ou l’instrumentation rotative, l’irrigation à pression positive, avec ou sans agitation sonique et ultrasonique, sont insuffisantes pour la désinfection totale du canal. Le protocole de traitement présenté dans cet article intègre trois composantes principales : la gestion de la largeur de travail du canal radiculaire, l’irrigation sous pression apicale négative et la thérapie laser intracanalaire.

Gestion de la largeur de travail
La largeur de travail d’un canal est le diamètre du canal juste avant d’atteindre la constriction apicale. Allen (2007) a constaté que 97 % des canaux qui n’étaient pas nettoyés à leur largeur de travail avaient des débris résiduels dans la région apicale critique, tandis que 100 % de ceux nettoyés à leur largeur de travail étaient exempts de débris à 1 mm de la constriction apicale. Des études ont montré que nous devons nettoyer à de plus grands diamètres, pour enlever les bactéries et les débris (Kerekes 1977, Wu, 2000). Les limes coniques conventionnelles ne peuvent pas accomplir cela sans déporter le canal, créer des perforations, ce qui affaiblit la dent ou casse les instruments. Le LightSpeed LSX (Discus Dental) est une lime unique, extrêmement flexible, sans conicité, en nickel-titane, capable de nettoyer jusqu’à la largeur de travail. La taille finale apicale est la taille de l’instrument qui achève la préparation de la largeur de travail et est déterminée lorsque la lime LSX arrive à 4 mm (ou plus) de la longueur de travail, et nécessite une ferme poussée pour atteindre la longueur de travail. La préparation apicale adaptée est essentielle pour réussir une endodontie prévisible et fournir des avantages significatifs :

_L’enlèvement effectif du matériel infecté, débris, tissus enflammés ou nécrosés de la région apicale.
_Permettre le placement de l’aiguille pour irriguer à la longueur de travail pour l’irrigation à pression apicale négative.
_Faciliter le placement de médicaments intracanalaires plus profondément dans le canal.
_Faciliter le placement de l’embout laser à tir radial à 1mm de la longueur de travail.

L’irrigation à pression apicale négative
Il y a deux raisons principales pour lesquelles les irrigants ne parviennent pas à atteindre les 3 derniers mm critiques d’un canal radiculaire. Tout d’abord, en utilisant l’irrigation à pression positive avec une aiguille à ouverture latérale, il y a peu de liquide au-delà de la profondeur de l’aiguille (Chow, 1983). La plupart de l’irrigant suit le chemin de moindre résistance et coule hors du canal avec une irrigation apicale à seulement 1–2 mm de l’extrémité de l’aiguille. Pour la réalisation effective du rinçage apicale, la pointe de l’aiguille doit être placée à 1 mm de la longueur de travail, ce qui augmente considérablement le risque d’accident d’hypochlorite.

Deuxièmement, la présence de bouchons de vapeur à cause d’air emprisonné dans la partie apicale du canal, ainsi que l’ammoniaque et le dioxyde de carbone libérés par l’action dissolvante de l’hypochlorite de sodium sur le tissu pulpaire, empêchent la pénétration d’irrigants dans le tiers apical. Ce bouchon de vapeur ne peut pas être enlevé avec la main ou avec des limes rotatives, l’activation sonore ou ultrasonore. Dans une étude récente, le bouchon de vapeur a entraîné la « rétention brute de débris et boue dentinaire résiduelle » enfermés dans les 0,5-1,0 mm apicaux du canal radiculaire obstrué (Tay et al. 2010).

L’EndoVac (Discus Dental) est un vrai système d’irrigation par pression négative apicale, qui fournit en continu l’irrigation à volume élevé des fluides frais à la terminaison du canal, avec évacuation simultanée. Il est composé d’un embout-maître (Fig. 4) qui fournit le fluide à la chambre pulpaire et une macro et une micro-canule (Fig. 5) qui attirent le fluide de la chambre, comme moyen d’évacuation de la terminaison du canal. Ce système élimine les bouchons de vapeur et fournit un nettoyage supérieur, la désinfection et la suppression de la boue dentinaire, tout en éliminant pratiquement la menace d’accident d’hypochlorite de sodium (Schoeffel 2008). Par rapport à l’irrigation à pression positive avec une aiguille ProRinse, EndoVac produit des canaux qui ont été 366 % et 671 % plus propres, à respectivement 1 mm et 3 mm de la longueur de travail (Nielsen & Baumgartner 2007). Lorsque l’EndoVac a été utilisé en combinaison avec l’instrumentation LightSpeed LSX, les canaux ont été libérés de 99 % et 99,5 % des débris à respectivement 3 mm et 1 mm de la longueur de travail (Prashanth & Shivanna 2008).

Thérapie intracanalaire au laser
L’étape finale de la préparation et de la désinfection du canal radiculaire est complétée par le laser Waterlase MD (Er, Cr: YSGG) à l’aide d’embouts pour tir radial (Biolase Technology).

Les embouts laser sont disponibles en deux tailles: RFT2 et RFT3 avec des diamètres de respectivement 275 μm et 415 μm (Fig. 5). La pointe RFT2 est insérée à –1 mm de la longueur de travail, nécessitant une préparation du canal à la norme ISO 30 ou plus, tandis que la pointe RFT3 est insérée à la jonction du tiers moyen et apical, nécessitant des tailles de canal de ISO 45 ou plus. Ces tailles correspondent bien aux tailles types pour la préparation en largeur de travail avec les limes LSX. La thérapie intracanalaire au laser est effectuée en deux phases, la phase de nettoyage par l’enlèvement de la boue dentinaire et des débris, et la phase de désinfection par ablation des tissus et élimination des bactéries.

Phase de nettoyage (1,25 W;50 Hz ; 24 % d’air; 30 % d’eau) :
Cette phase utilise de l’eau et élimine la boue dentinaire et les débris sans utiliser d’irrigants chimiques. Elle prend 2 à 3 minutes par le canal et utilise l’HydrophotonicsTM pour créer un puissant effet de micro-agitation tout au long du système canalaire.

Il est généralement admis que la suppression de la boue dentinaire facilite le nettoyage et la désinfection des tubuli dentinaires, et améliore l’étanchéité du canal radiculaire.

Lors de la fusion des résultats de deux études, l’Er,Cr:YSGG avec les embouts de tir radial produit un retrait de la boue dentinaire nettement meilleur dans les tiers apical, médian et coronal que les deux techniques rotatives (Sung et al. 2007, Peters & Barbakow 2000). Cette action extrêmement efficace ouvre les tubuli dentinaires, les canaux latéraux et les isthmes en préparation de la désinfection (Figs. 6, 7 et 8).

Phase technique de nettoyage : après l’achèvement de l’accès, la préparation de la largeur de travail et l’irrigation par pression négative :
_Utilisez le RFT2 pour effectuer le nettoyage partiel, au 2/3, coronal et apical.
_Sélectionnez les paramètres recommandés du laser pour le mode humide.
_Remplissez le canal avec une solution stérile.
_Insérez la pointe RFT2 à 1 mm de la longueur de travail.
_Activez le laser en retirant la pointe coronaire à environ
1 mm / s. Maintenir la pointe en contact avec la surface latérale de la paroi du canal, pendant toute la remontée apicale-coronale.
_Répétez les étapes 4 et 5 une ou deux fois de plus pour s’assurer que tout le canal interne a été nettoyé (Fig. 9).
_Placez la pointe RFT3 pour effectuer le nettoyage final
des 2/3 coronaux.
_Remplissez le canal avec une solution stérile.
_Insérez la pointe à la jonction des tiers apical et médian
du canal radiculaire.
_Répétez les étapes 5 et 6.

Phase de désinfection (0,75 W ; 20 Hz ; 10 % d’air ; 0 % d’eau)
Comme indiqué précédemment, l’énergie laser émise par l’Er,Cr:YSGG est fortement absorbée par l’eau dans les tissus et les micro-organismes, entraînant une photo-ablation instantanée. De plus, la micro-expansion d’impulsion et d’effondrement de l’eau intratubulaire produit des ondes acoustiques assez fortes pour perturber et tuer les bactéries intratubulaires.

Cet effet est plus efficace en mode sec puisque l’énergie laser n’est pas absorbée par le jet d’eau et peut exercer son plein effet sur les bactéries. Cela a été confirmé par Gordon et al. (2007) qui ont réalisé un taux de 99,7 % pour E. faecalis en mode sec. La phase technique de désinfection est la même que la phase de nettoyage, mais avec des réglages différents du laser pour le mode sec.

_Applications cliniques

Bien que ce protocole soit recommandé pour tous les traitements endodontiques (Figs. 10, 11, 12 et 13), il est plus précieux dans les situations cliniques suivantes :

_Cas infectés avec radiotransparence apicale, latérale et / ou furcale.
_Retraitements avec parodontite périapicale.
_Cas d’inflammation aigue, surtout ceux diagnostiqués avec le syndrome de dent fêlée.
_Résorption interne et externe.
_Infections persistantes ne répondant pas au traitement endodontique conventionnel.
_Inconfort postopératoire prolongé, inexpliqué.

_Résumé

Un protocole de nettoyage, de façonnage et de désinfection du canal radiculaire a été décrit, qui maximise le retrait des tissus, des débris et bactéries de la smear layer du canal. Utilisant une combinaison de gestion de la largeur de travail avec les instruments LightSpeed LSX, un volume élevé d’irrigation apicale à pression négative, l’évacuation avec le système EndoVac et la thérapie intracanalaire au laser à tir radial en utilisant les embouts laser WaterlaseMD, la capacité d’éliminer totalement les bactéries de systèmes canalaires infectés pourrait bientôt être à notre portée._

Note de la rédaction : Cet article est paru dans le DT Study Club, Vol. 1, No. 3, décembre 2013.

_Bibliographie
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- Prashanth, Shivanna V: Evaluation of New System for Root Canal Irrigation to Conventional: An Ex Vivo Study. Discus Dental, Culver City, CA: The EndoFiles Newsletter (2008).

- Schoeffel J: The EndoVac Method of Endodontic Irrigation, Part 2 – Efficacy. Dentistry Today 27:1 (2008).

- Schoop U, Barylyak A, Goharkhay K, Beer F, Wernisch J, Georgopoulos A, Sperr W, Moritz A: The impact of an erbium,chromium:yttrium-scandium-gallium-garnet laser with radial-firing tips on endodontic treatment. Lasers Med Sci 24:1:59–65 (2007).

- Siqueira JF, Rocas IN: Clinical Implications and Microbiology of Bacterial Persistence after Treatment Procedures. J Endod 34:11: 1291–1301 (2008). Sung E, Rankin DD, Rizoiu I, Chueh P: Biolase Technology, unpublished study (2008).

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