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Facteurs de réussite de l’implantation immédiate avec mise en charge immédiate - Une étude de cas

Après la fracture de la couronne de la dent 22 traitée au moyen d’un tenon radiculaire, seule une racine résiduelle est restée en place. Le patient ne voulait pas que l’on touche aux dents adjacentes.
Dr Rouven Bönsel

Dr Rouven Bönsel

mer. 12 mars 2014

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Le remplacement de dents perdues par des implants peut être un long processus pour les patients. Pendant la phase de temporisation, il leur faut souvent accepter des restrictions esthétiques. L’option la plus rapide et la plus agréable pour le patient est l’implantation immédiate avec temporisation immédiate. Toutefois, afin de ne pas aboutir à un échec tout aussi rapidement, cette solution de traitement nécessite une certaine expérience et une connaissance pratique des facteurs de réussite.

Les concepts classiques qui préconisent l’implantation différée et la cicatrisation sans mise en charge, sont de plus en plus remis en question. D’une part, les modèles et les surfaces implantaires actuels permettent des temps de cicatrisation plus courts que par le passé. Généralement, une restauration se révèle parfaitement fonctionnelle après six à huit semaines seulement.1 Ce progrès conduit également à raccourcir la durée totale des traitements implantaires, dans des zones déjà complètement cicatrisées ou édentées depuis un certain temps. D’autre part, si c’est possible et pertinent, de nombreux praticiens dentaires et chirurgiens-dentistes expérimentés, posent les implants dans l’alvéole encore frais, immédiatement après l’extraction. Cette démarche a l’avantage principal d’offrir aux patients un traitement qui n’est pas seulement un précieux gain de temps, mais qui est aussi moins traumatique et moins coûteux. La temporisation immédiate apporte également un soutien direct au tissu mou, au moyen d’une restauration provisoire dont l’aspect est naturel. L’augmentation osseuse est généralement réalisée en même temps que l’implantation immédiate. Cette procédure s’applique tout à la fois à la temporisation immédiate, et à la cicatrisation enfouie ou transgingivale. Si le déficit en tissu osseux est léger, une régénération contrôlée mineure est largement suffisante. Elle peut par exemple, être obtenue au moyen d’un substitut d’os qui est lentement absorbé, et d’une membrane. Par contre, lorsque les pertes sont plus importantes, la procédure peut être techniquement délicate, surtout en raison du manque fréquent de volume de tissu mou.1 Dans ce cas, on recommande une intervention en deux temps avec préservation de l’alvéole et implantation dans la crête alvéolaire augmentée, ou une implantation simultanée par des techniques de tissu mou appropriées, permettant de recouvrir l’implant proprement.2

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La réussite d’une implantation immédiate avec temporisation immédiate, requiert un alvéole osseux pratiquement intact et en particulier, une lamelle vestibulaire intègre et suffisamment épaisse. Cependant, même l’utilisation de techniques radiologiques tridimensionnelles (3D) ne permet de le déterminer avec certitude, qu’après l’extraction de la dent. La réussite de l’implantation immédiate requiert également une stabilité primaire suffisante, correspondant à au moins 35 Ncm.3 Au cours du processus d’ostéointégration, l’os est en mesure de transformer les forces mécaniques en stimuli biologiques. Dans ce contexte, le degré d’expansion de l’os soumis aux forces joue un rôle fondamental. Il est impératif d’éviter des microtraumatismes, susceptibles de provoquer des tensions extrêmes, au niveau de l’interface entre l’implant et l’os.4

De plus, le risque de récession semble être moins élevé chez les patients présentant un tissu gingival épais, que chez les patients présentant un tissu mince.5, 6 On peut le déterminer facilement avec une sonde PA, introduite dans le sillon gingivo-dentaire (sulcus) vestibulaire. Si le métal est visible au travers du tissu, le patient possède un phénotype gingival fin, sinon le phénotype est dit épais.7 Finalement, le choix du traitement dépend également de facteurs extérieurs, tels que la ligne du sourire du patient, ainsi que ses attentes en termes d’esthétique, de coût et de durée du traitement.

Selon des études récentes, si tous ces facteurs sont pris en compte, la temporisation immédiate — parallèlement à l’implantation immédiate — peut produire sur les tissus durs et mous, des effets qui sont tout aussi stables que les résultats obtenus par une mise en charge conventionnelle, après trois à six mois.8, 12 Le degré de contact à l’interface os-implant semble également comparable dans les protocoles de traitement immédiat et différé.11 Toutefois, il y a lieu d’éviter autant que possible, les points de contact dentaires statiques et fonctionnels, dans le cas de la temporisation immédiate. Le risque que constitue l’intégration immédiate de la restauration définitive est trop élevé, en raison des modifications tissulaires imprévisibles, qui surviennent pendant la phase de cicatrisation.

Étude de cas
Chez ce patient âgé de 66 ans, la couronne de la dent 22 avait été fracturée (Fig. 1). Le traitement endodontique avait consisté à placer un tenon radiculaire et une couronne environ 15 années auparavant. Le patient ne ressentait aucune douleur et aucune anomalie périapicale ne pouvait être observée. Cependant, compte tenu de la finesse de la racine, la pose d’un nouveau tenon et d’une nouvelle couronne ne semblait pas conseillée (Fig. 2). Vu que le patient refusait que les dents avoisinantes soient meulées (selon ses propres paroles : « Je veux juste une nouvelle incisive et je ne veux absolument pas que l’on touche aux dents saines à côté »), un implant était la seule solution.

La radiographie panoramique indiquait une obturation incomplète de la racine résiduelle, une perte osseuse horizontale généralisée, et des restaurations dentaires et radiculaires dans les quatre quadrants (Fig. 2). La profondeur de poche n’était pas complètement anodine, 3 à 3,5 mm, et on ne remarquait aucun saignement au sondage. La parodontite était manifestement accompagnée d’une récession tissulaire, mais pratiquement sans formation de poche ou présence d’une inflammation aiguë. Le tissu mou était quelque peu irrégulier et pouvait être classé dans la catégorie du phénotype épais. Les autres diagnostics se résumaient à une parodontite due à la pulpe de la dent 45, un implant en position 44, une inclinaison importante de la dent 37 en direction de la position édentée 36, et une dent retenue en position 38. Aucune anomalie fonctionnelle n’était présente. Le patient ne fumait pas et hormis une hypertension contrôlée par des médicaments, il était en bonne santé. En tant que directeur d’une entreprise industrielle soumis à des obligations sociales, le patient ne souhaitait pas une restauration provisoire amovible. Vu qu’il était également un homme très actif, il était préférable de poser un implant immédiat, suivi d’une restauration provisoire dans les 24 heures, selon l’état de l’alvéole après l’extraction. Cette procédure ne nécessitait qu’un nombre minimal de rendez-vous sur une période bien définie. Grâce aux conclusions cliniques et à un plan de traitement faisant intervenir une bille d’acier radio-opaque (radiographie panoramique ; Fig. 2), il a été possible de déterminer la longueur de l’implant et le diamètre approprié, en préopératoire.

Un périotome a été utilisé pour extraire la racine et toutes les précautions ont été prises pour ne pas traumatiser le tissu dur ou mou inutilement (Fig. 3), ce qui a ainsi permis d’éviter un détachement du tissu mou. L’alvéole dentaire a été sondé et a révélé une lamelle vestibulaire intègre (Fig. 4). Le tissu de granulation présent a été éliminé. Aucun signe d’inflammation aiguë n’a été observé. La figure 5 montre le rapport dimensionnel des racines résiduelles extraites à l’implant (Replace Select Tapered, plate-forme normale 4,3 x 10 mm, Nobel Biocare). La figure 6 représente l’implant inséré en position finale. L’épaulement de l’implant en vestibulaire a été placé approximativement à 1 mm sous la crête (voir également la figure 7), le canal de l’attachement interne étant orienté vestibulairement (Fig. 6).

Comme le montre la figure 6, la position de l’implant a été déplacée vers le palais, pour obtenir une distance de sécurité allant jusqu’à 2 mm, par rapport à la paroi vestibulaire (familièrement appelée la « jumping distance », qui correspond à l’hiatus présent entre la surface de l’implant et l’os cortical). Après l’implantation, l’hiatus a été augmenté avec un mélange de substitut osseux Bio-Oss (Geistlich) et d’os endogène, ce dernier ayant été prélevé dans la région du tubercule gauche, au moyen d’une râpe à os. L’utilisation d’une membrane de couverture n’a pas été nécessaire. Le suivi radiographique (Fig. 7) montre les distances correctes par rapport aux dents adjacentes, et la position verticale correspondant approximativement à celle de la racine extraite (voir figure 2).

De même, la forme de l’implant correspond étroitement à la forme conique de la racine. Il est ainsi possible d’éviter une perforation de la paroi alvéolaire vestibulaire, surtout chez les patients présentant un os vestibulaire mince. C’est pourquoi, le trou de guidage doit toujours être foré en direction palatine vers la pointe de la racine naturelle, et les trous d’expansion doivent l’être en exerçant une pression en direction palatine. La surface a été préparée selon le protocole standard. L’implant a ensuite été inséré en appliquant un couple de vissage de 35 Ncm. La stabilité primaire obtenue de la sorte, satisfaisait aux conditions primordiales requises pour la mise en charge immédiate. Vu que le patient souhaitait une restauration esthétique immédiate et de haute qualité, il a été prévu de placer une couronne provisoire en matériau composite devant être fabriquée en laboratoire, et une empreinte a donc été prise avec un porte-empreinte ouvert sur mesure (Fig. 8).

Pour minimiser le temps de laboratoire nécessaire à la préparation, la position de l’implant a été transférée au modèle original, au moyen d’une clé de repositionnement en plastique (Pattern Resin, GC Europe). Le pilier en titane utilisé pour la couronne provisoire (Esthetic Abutment), était caractérisé par des bords festonnés, qui épousaient les contours du tissu mou et leur apportaient un soutien (Fig. 9). De plus, le pilier a été façonné sur mesure par le technicien dentaire, afin d’optimiser les conditions. Il restait malgré tout la possibilité d’effectuer des ajustements fins in situ, au moyen d’instruments rotatifs à pointe de carbure.

À peine 24 heures après l’implantation, le pilier sur mesure et la couronne provisoire en composite étaient en place (Figs. 9 et 10). L’ajustement correct du pilier sur l’implant a été vérifié par la prise d’une radiographie dentaire (voir figure 7). Toutes les précautions ont été prises lors de la fabrication de la couronne, pour éviter des points de contact statiques ou dynamiques, ce qui a été revérifié in situ. La couronne a ensuite été fixée avec un ciment provisoire (Temp-Bond, Kerr Dental). Le patient a également reçu la consigne d’exercer le moins de pression possible sur la couronne en mangeant.

Trois mois plus tard, après la prise d’une nouvelle empreinte, un pilier Procera Esthetic (Nobel Biocare) sur mesure a été posé, et la couronne définitive, réalisée entièrement en céramique par technique CFAO, a été scellée avec un ciment au verre ionomère (Fig. 10). La valeur du périotest mesurée pour l’implant était très satisfaisante à ce stade (–7).

Résultat et pronosticMalgré la récession gingivale et l’ajustage loin d’être parfait des restaurations des dents avoisinantes, la couronne se confondait harmonieusement avec les éléments adjacents. L’intégration du tissu mou était également convaincante. L’implantation immédiate associée à une restauration provisoire immédiate, a permis d’obtenir un résultat rapide, direct et esthétiquement agréable, en seulement quelques séances et sans la nécessité d’une restauration provisoire amovible. Cette solution répondait aux attentes du patient, et il a donc été ravi du résultat. La douleur causée par l’intervention chirurgicale en un temps a été minimale. Le pronostic de la restauration était également très satisfaisant. Selon la littérature, la procédure conduit à des résultats stables et durables, tant en ce qui concerne l’os crestal que le tissu mou.13 La même conclusion s’applique au système implantaire Replace Select Tapered utilisé. Lors d’une étude de cas concernant 66 implants posés chez 48 patients, aucune des prothèses n’a été perdue sur une période
de cinq ans, et les tissus durs et mous sont restés sains.9 La surface de l’implant TiUnite (Nobel Biocare), biologiquement optimisée, qui favorise l’apposition rapide et fiable des cellules osseuses, a également contribué à ce résultat favorable.13, 14

Malgré tout, la procédure décrite dans cet article comporte aussi des risques. Le résultat peut être affecté par des erreurs de diagnostic, d’indication et d’exécution. Dans notre cas, seule une radiographie panoramique assortie d’une norme de référence, a été préalablement prise à des fins diagnostiques. Vu que les circonstances entourant ce cas étaient idéales, il n’a pas été nécessaire de recourir à des procédures plus complexes. Si davantage d’indications et de marges de sécurité sont souhaitables, l’utilisation de techniques diagnostiques 3D, voire d’implantation assistée par ordinateur, est recommandée. Dans bien des cas, il n’est pas nécessaire de préparer un lambeau, ce qui ménage le patient, comme dans notre cas, et favorise la cicatrisation du tissu péri-implantaire sans complication.

Le système implantaire Replace Select Tapered utilisé, se distingue par une très grande facilité d’utilisation. La technique directe et bien conçue qui lui est associée, le rend particulièrement approprié à l’intégration dans les pratiques modernes d’orientation chirurgicale et implantaire, qui visent à impliquer le prothésiste et le technicien dentaire activement, dans le processus de traitement.

Note de la rédaction : une liste des références est disponible auprès de l’éditeur. Cet article est paru dans DT Study Club, numéro 01/2014.

 

Fig. 1 Après la fracture de la couronne de la dent 22 traitée au moyen d’un tenon radiculaire, seule une racine résiduelle est restée en place. Le patient ne voulait pas que l’on touche aux dents adjacentes.
Fig. 2 La radiographie panoramique montre, outre les autres diagnostics (se reporter au texte de l’article), la racine résiduelle 22 présentant une obturation incomplète et une perte osseuse horizontale généralisée. La bille servant de référence au plan de traitement implantaire peut être observée en position 22.
Fig. 3 La racine résiduelle 22 a été extraite avec un périotome, tout en préservant la lamelle vestibulaire et le tissu mou.
Fig. 4 Le sondage de l’alvéole ayant fait l’objet de l’extraction, a révélé des parois osseuses intactes, en particulier les parois vestibulaires.
Fig. 5 L’implant (Replace Select Tapered, Nobel Biocare) est relativement court, en raison de la perte osseuse horizontale (10 mm et un diamètre de 4,3 mm). La position apicale verticale prévue, correspondait approximativement à celle de la racine dentaire extraite.
Fig. 6 L’épaulement de l’implant inséré avec une stabilité primaire suffisante (35 Ncm), est en position apicale à environ 1 mm du bord de l’os crestal vestibulaire. Transversalement, il est décalé d’environ 1 mm ver le palais, afin d’obtenir une distance optimale par rapport à la lamelle vestibulaire. L’orientation vestibulaire de l’un des trois canaux internes peut être nettement observée.
Fig. 7 La radiographie montre l’implant avec le pilier temporaire. La distance du bord de l’os au point de contact de la couronne est d’environ 5 mm, en raison de perte osseuse marginale.
Fig. 8 La coiffe de transfert servant à la prise d’empreinte à ciel ouvert a été vissée. La position de l’implant a été communiquée au laboratoire, au moyen d’une clé de repositionnement en plastique.
Fig. 9 Au laboratoire, le technicien dentaire a préparé un pilier en titane fabriqué sur mesure (Esthetic Abutment), et façonné la couronne en composite provisoire, qui a été scellée seulement 24 heures après l’implantation.
Fig. 10 Deux mois plus tard, le tissu mou était stable et exempt d’inflammation. La couronne provisoire a été conçue de façon à éviter les points de contact statiques ou fonctionnels.
Fig. 11 Une nouvelle empreinte a été prise quatre semaines plus tard. Un pilier en dioxyde de zirconium a été vissé, et la couronne définitive, entièrement en céramique et fabriquée par technique CFAO, a été scellée. Le patient s’est montré ravi du résultat.

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