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Laser vs traitements classiques

Traitement par laser infrarouge d’une infection herpétique primaire, chez un patient adolescent astreint à une chimiothérapie (thérapie XT, DMC).
Cristiane Meira Assunção, Joanna Tatith Pereira, Renata Schlesner Oliveira & Dr Jonas de Almeida Rodrigues

Cristiane Meira Assunção, Joanna Tatith Pereira, Renata Schlesner Oliveira & Dr Jonas de Almeida Rodrigues

mer. 3 décembre 2014

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Ces récentes années ont vu plusieurs études se pencher sur les possibilités cliniques du laser en dentisterie. Simultanément, de nombreuses organisations ont clairement exprimé leur appui à l’usage du laser dans ce domaine. Au cours des dernières décennies, le laser a été utilisé en dentisterie, comme traitement d’appoint ou de remplacement des approches traditionnelles. Cet article se propose de présenter quelques applications actuelles : la prévention et le diagnostic des caries, le traitement des tissus durs et mous et enfin, les procédures parodontales et endodontiques. Aujourd'hui toutefois, on assiste à un effort important de recherche sur de nouvelles indications du laser en dentisterie, et on prévoit que le laser deviendra une composante essentielle de l’arsenal du chirurgien-dentiste. Alors que par le passé, la technologie était jugée complexe et d’usage limité en dentisterie clinique, de nos jours, elle est marquée par une prise de conscience accrue de l’utilité du laser dans les soins dentaires modernes. Le laser peut être utilisé comme appoint ou pour remplacer les démarches traditionnelles.1 Si l’on veut comparer le laser avec les traitements classiques, il est néanmoins essentiel de considérer trois aspects importants : la sécurité, l’efficacité théorique et l’efficacité pratique. Par souci d’éthique, il importe de se référer aux données disponibles les plus probantes, lors de la prise de décisions cliniques.2

_Applications diagnostiques du laser

Les moyens de détection des caries les plus courants, sont les examens visuels et radiographiques.3 Toutefois, l’observation visuelle est une méthode subjective qui dépend de la connaissance et de l’expérience clinique du praticien.3–6 Il ressort également de plusieurs études, que l’examen radiographique est peu sensible aux lésions non cavitaires.3, 7-9

C’est donc avec l’objectif de détecter les lésions carieuses occlusales et proximales, que des techniques reposant sur la fluorescence ont été développées, par exemple, les sondes DIAGNOdent 2095 (LF, KaVo ; Figs. 1a–c) et DIAGNOdent 2190 (LF PEN, KaVo ; Figs. 2a et b). Elles s’appuient sur le même principe : une diode laser émet dans le rouge à 655 nm et un photodétecteur quantifie la fluorescence émanant des métabolites bactériens (fluorophores), présents dans les lésions carieuses par des valeurs de 0 à 99.3,9

Une étude qui évaluait la performance d’une méthode visuelle, d’un examen radiographique et des techniques de fluorescence, pour détecter les caries occlusales dans des dents temporaires, a indiqué une meilleure précision de la méthode visuelle et de la caméra à fluorescence (VistaProof FC, Dürr Dental) dans la détection des lésions carieuses de l’émail et de la dentine, tandis que la méthode visuelle combinée avec les sondes LF, LF PEN et la caméra FC révélait mieux les lésions dentinaires sur les faces occlusales des dents temporaires, sans différence statistiquement significative entre elles.3

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Une autre étude a comparé la performance des techniques de fluorescence (FC, LF et LF PEN), de l’examen radiographique et d’une autre méthode visuelle appelée ICDAS (système international de classification et d’évaluation des lésions carieuses) II sur les faces occlusales. Cette étude a démontré que la combinaison de l’ICDAS et de radiographies rétrocoronaires interproximales, garantissait les meilleurs résultats de détection des caries occlusales.9

_Prévention des caries : augmenter la résistance de l’émail

De plusieurs études in vitro menées antérieurement, il est ressorti que le rayonnement laser pouvait augmenter la résistance de l’émail à la déminéralisation. Dans une étude in vitro menée en aveugle Ana et al. (2012),1 ont comparé l’effet de l’application de fluorures par des techniques professionnelles, avec celui du rayonnement laser sur la déminéralisation de l’émail, la formation et la rétention des fluorures. Selon l’étude, les deux méthodes ont accru la résistance de l’émail, et aucun effet secondaire n’a été observé. Le groupe traité par laser présentait une concentration plus importante de composés de fluorure de calcium. La formation et la rétention du fluorure de calcium se révélaient également meilleures, lorsque le rayonnement laser était utilisé.

Les longueurs d’onde absorbées le plus fortement par l’émail dentaire, sont celles des lasers au dioxyde de carbone émettant à 9,3 et 9,6 μm. La réduction de la dissolution de l’émail par les acides, serait causée par une perte de la phase carbonatée des cristaux d’apatite de l’émail, due à la chaleur du rayonnement. Rechmann et al. (2011),10 ont démontré que le laser au dioxyde de carbone émettant des impulsions courtes à 9,6 μm inhibait efficacement la carie de l’émail, sans causer de lésions du tissu pulpaire des dents exposées au rayonnement. L’efficacité du laser au dioxyde de carbone (CO2) quant à son effet à long terme sur la résistance aux caries, peut être vérifiée par d’autres études.

_Application aux tissus durs : élimination de la carie

Il n’existe qu’un nombre limité de données prouvant l’efficacité pratique des lasers dentaires pour éliminer la carie, comparativement aux fraises rotatives. Une revue systématique de sept études menées avec des techniques appropriées, a été réalisée afin d’en faire l’évaluation.8 Dans l’ensemble de ces études, deux n’observaient aucune différence au regard du temps nécessaire à l’élimination de la carie et à la préparation cavitaire, et quatre indiquaient que la réalisation de ces procédures prenait jusqu’à trois fois plus de temps lors de l’utilisation du laser.

Au niveau du tissu pulpaire, les effets produits par les lasers et les fraises rotatives, apparaissaient similaires dans quatre des études. Selon l’une des études, les chirurgiens-dentistes préfèrent la fraise au laser. Par contre, toutes rapportaient que les patients privilégient le laser sur le plan du confort, tout au moins les patients adultes. La réponse des enfants ne permettait pas de tirer une réelle conclusion. Ce résultat n’est pas surprenant vu que, le laser ne nécessitant généralement pas d’anesthésie locale, l’expérience du traitement dentaire vécue par le patient est meilleure.10

_Procédures endodontiques au laser (désinfection)

Les principales causes d’échec du traitement endodontique sont la persistance de micro-organismes et la recontamination du canal radiculaire due à une obturation inappropriée.11 Le taux de réussite à long terme du traitement endodontique traditionnel dépend de plusieurs facteurs, notamment de l’anatomie diverse et complexe du système radiculaire, qui est constitué de canalicules divergeant du canal principal. De par la position et le diamètre des canaux, ce système compliqué ne permet en effet pas l’accès direct lors d’une préparation biomécanique.6 De nouvelles approches antimicrobiennes ont été proposées pour désinfecter les canaux radiculaires, dont l’utilisation de lasers haute puissance et de la thérapie photodynamique basée sur la génération de chaleur dépendant de la dose. Toutefois, outre l’effet bactéricide, ces approches sont susceptibles d’entraîner des dommages collatéraux tels qu’une calcination de la dentine, une ankylose des racines, une fonte du cément, une rhizalyse et une nécrose périradiculaire.2

Afin de comparer les efficacités pratiques de la thérapie photodynamique antimicrobienne d’un traitement endodontique classique, et de la combinaison des deux modalités pour éliminer les biofilms bactériens présents dans les canaux radiculaires infectés, une étude a été menée sur dix dents monoradiculaires humaines, fraîchement extraites et inoculées avec des bactéries à Gram négatif, présentant une bioluminescence stable. Il a été observé que le traitement endodontique seul réduit la bioluminescence bactérienne de 90 %, alors que la thérapie photodynamique seule réduit la bioluminescence de 95 %. Le traitement combiné réduit la bioluminescence jusqu’à 98 % et plus remarquable encore, la reprise de la croissance bactérienne observée 24 heures après le traitement était nettement moins marquée dans le groupe ayant reçu le traitement combiné, que dans les groupes de traitement individuel.12

Des solutions de remplacement aux traitements classiques permettant d’améliorer la désinfection des canaux radiculaires, sont les lasers Nd:YAG et Er:YAG. Une étude a évalué l’efficacité bactéricide des lasers Nd:YAG et Er:YAG dans les canaux radiculaires courbes infectés, à des fins expérimentales. Il s’est avéré que, dans les canaux radiculaires droits, le laser Er:YAG produisait un effet bactéricide de 6,4 à 10,8 % plus élevé que celui du laser Nd:YAG. Par contre, dans les canaux radiculaires courbes, l’effet bactéricide du laser Er:YAG se révélait 1,5 à 3,1 % plus élevé que celui du laser Nd:YAG.13 Ces résultats semblent indiquer que les embouts et les techniques laser à usage endodontique, nécessitent un développement plus poussé pour en garantir l’efficacité.

_Procédures parodontales au laser (désinfection)

Les procédures traditionnelles de traitement parodontal sont notamment le détartrage et le surfaçage radiculaire mécaniques. Ces techniques comportent cependant certaines limitations, surtout au regard de la réduction bactérienne à l’intérieur des poches parodontales profondes. Plusieurs protocoles d’appoint ont donc été développés, afin de surmonter les restrictions du traitement mécanique classique. Le laser a notamment été proposé pour ses effets bactéricides et détoxifiants, ainsi que pour sa capacité à atteindre des sites inaccessibles à une instrumentation mécanique classique.14

Il serait possible d’utiliser différents lasers dans un traitement parodontal visant à l’élimination du tartre, la décontamination des poches parodontales, leur désinfection par photoactivation de colorants et la désépithélialisation, afin de favoriser les processus régénératifs.15

Plusieurs études ont démontré que la diode laser, émettant à des longueurs d’onde comprises entre 655 et 980 nm, peut accélérer la cicatrisation des plaies en facilitant la synthèse du collagène, en favorisant l’angiogenèse et en augmentant la libération des facteurs de croissance. Par ailleurs, la diode laser produit des effets bactéricides et détoxifiants in vitro, et peut éviter une ablation de la surface radiculaire, ce qui, théoriquement, réduit le risque d’une élimination de tissu radiculaire sain.13

Lors d’une revue systématique, Sgolastra et al. (2012),14 n’ont pas observé de différences significatives dans aucun des résultats analysés (niveau d’attache clinique, profondeur des poches au sondage, et modifications de l’indice gingival et de l’indice de plaque). Ces résultats semblent indiquer que l’utilisation de la diode laser comme appoint au traitement parodontal non chirurgical classique, n’apporte aucun bénéfice clinique supplémentaire. Cependant, étant donné que l’analyse portait sur un nombre restreint d’études, les résultats doivent être interprétés avec prudence. Il reste à clarifier des questions importantes, dont l’influence du tabagisme sur les issues cliniques, l’efficacité pratique de l’utilisation en appoint de la diode laser sur les issues microbiologiques, et l’incidence des effets indésirables. Il est nécessaire de mener d’autres études pour évaluer l’efficacité de la diode laser en traitement d’appoint, ainsi que pour déterminer la dosimétrie et les réglages appropriés du laser.

_Applications aux tissus mous

De nombreuses procédures sur les tissus mous peuvent être réalisées avec le laser. Ses deux avantages principaux sont la réduction des saignements peropératoires et de la douleur postopératoire comparativement aux techniques classiques, telles que l’électrochirurgie. Les lasers, dont les propriétés hémostatiques sont supérieures, sont mieux adaptés à certaines procédures chez des patients atteints de troubles de la coagulation.5

_Conclusion

Bien que le traitement laser produise des résultats similaires (en termes de sécurité, d’efficacité théorique et d’efficacité pratique) à ceux obtenus grâce aux méthodes classiques, de nouvelles techniques et de nouveaux dispositifs ont été développés dans ce sens. Le laser pourrait par conséquent devenir une option thérapeutique bien tolérée, et fondée sur des données probantes pour le chirurgien-dentiste dans l’exercice dentaire quotidien._

Note de la rédaction : une liste des références est disponible auprès de l’éditeur.
Cet article est paru dans le magazine DT Study Club, Vol.2, numéro 4, décembre 2014.

 

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